Trois semaines entre le 17 Tamouz et le 9 Av (1) – Rav Moshé Shapira
Trois semaines entre le 17 Tamouz et le 9 Av
נושה של ״בין המצרים״ תשע״ד
Le cours traite de « Ben Hamétsarim » la période des trois semaines entre le 17 Tamouz et le 9 Av.
Traduit et adapté par Rav Michael Smadja
Dans la משנה תענית (Mishna traité Taanit), il est enseigné:
» 5 événements sont arrivés à nos ancêtres le 17 תמוז et 5 autres le 9 אב. Le 17 תמוז, ont été brisées les tables de la loi, le sacrifice journalier a été annulé, la muraille du temple a été percée la תורה a été brûlé par Aposthémus et une idole a été installée dans le היכל, le bâtiment intérieur du temple.
Le 9 אב, il a été décrété que nos ancêtres ne rentreraient pas en ארץ ישראל, le 1er et 2ème temple ont été détruits ce jour-là, la ville de bétar a été rasée par les romains et est devenue un champ de labour.
À partir du moment où nous entrons dans le mois de אב, nous devons diminuer la joie. » [fin de la Mishna]
A priori le sens simple de cet enseignement est que ces événements ont été la cause de ces deux jeûnes du 17 תמוז (17 Tamouz) et du 9 אב (Av).
Mais cela n’est pas exact car ces 2 jeûnes ont déjà été décrétés par prophétie bien avant que ne se déroulent la majorité des événements qui y sont décrits. Ils ont été décrétés des centaines d’années avant que Aaposthémus ne brûle la תורה(Torah) et bien avant que la ville de bétar n’ai été détruite car elle a été détruite bien des années après la destruction du 2ème temple.
Seuls deux événements sont arrivés avant le décret du jeûne du 9 אב (Av):
- l’annonce que nos ancêtres ne rentreraient pas en ארץ ישראל(Terre d’Israël)
- et la destruction du 1er temple.
Et donc, il est impossible que l’intention de la משנה(Mishna) ait été de nous enseigner que ces événements étaient les déclencheurs du décret prophétique de ces jeûnes.
Il en est de même pour le jeûne du 17 תמוז.
Alors que veut nous enseigner la משנה?
Nos sages appellent ces jours, cette période « בין המצרים » « entre les limites » d’après le verset: » כל רפדיה השיגום בין הממרים » « et tous vos poursuivants vous rattraperons entre ces limites« . « בין המצרים » est une expression qui est plus appropriée pour définir un plan physique et non une période, un plan temporel.
« Entre les limites » définit un endroit étroit, limité par une barrière d’un côté et de l’autre et aucune possibilité de s’en échapper. Et lorsqu’un homme entre dans un endroit étroit et confiné, il est facile de l’attraper car il n’y a aucun chemin pour s’enfuir.
Pour transcrire ce terme spatial « entre les limites » en terme temporel, il faut transformer ces deux dates que sont le 17 תמוז(Tamouz) et le 9 אב(Av) en début et fin d’une période spécifique. Une période particulière qui commence du 17 תמוזet qui se finit le 9 אב. Et les points qui sont entre le début et la fin deviennent un endroit étroit. Il y a un lien étroit entre tous les moments de cette période qui ont obligatoirement comme point commun le point de départ et le point d’arrivée.
De là nous comprenons qu’il y a aussi une notion d’étroitesse dans le temps. Le temps pouvant être comme l’espace, un endroit temporel confiné d’où je ne peux m’échapper.
Chacun des points temporels qui sont entre ces deux limites temporelles, chaque moment présent engendre beaucoup de passé et de futur et chacun de ces points de présent s’associent pour faire exister un temps au milieu, entre ces deux limites temporelles.
Ces deux limites temporelles sont des temps d’une dureté extrême et tout ce qui se trouve au milieu de ces deux limites temporelles, matérialise un endroit étroit d’où il est impossible de s’extraire ni par la droite ni par la gauche.
Le מהר״ל(Maharal de Prague) explique que ces 5 événements qui forment la limite appelée 17 תמוז(17 Tamouz) et les 5 événements qui forment la limite appelée 9 אב(9 Av) sont la représentation du nombre 10 nombre parfait.
Et par ce nombre, l’intention est d’arriver à la destruction générale. Le chiffre 10 est toujours l’association d’unités qui arrivent à une globalité pour en faire un tout.
Ces 10 événements qui sont arrivés le 17 תמוז et le 9 אב se complètent l’un à l’autre pour devenir une entité parfaite. A cela, la משנה(Mishna) faisait référence. L’association de ces 5 événements avec ces 5 autres événements ont créé un nombre parfait de 10. La parfaite destruction qui s’est matérialisée par deux pôles de 5 événements qui se sont passés ce jour et 5 autres cet autre jour.
Il est enseigné dans מסכת כתובות (Talmoud traité Kétouvoth):
» גדולים מעשה צדיקים יותר ממעשה שמים
« plus grands sont les actes des justes que les actes qui ont créé les cieux et la terre. »
Car au sujet des cieux et de la terre, il est écrit:
- « même Ma main (la main gauche) a formé les bases de la terre et ma main droite a fait gonfler les cieux. »
Alors qu’au sujet des actes des justes, des צדיקים, il est écrit:
מכון לשבתך פעלת הי מקדש הי כוננו ידיך
« L’endroit de ta résidence tu as créé, D-ieu, le temple saint D-ieu tu l’as installé de tes mains ».
Le temple a été bâti si l’on peut s’exprimer ainsi avec ses deux mains.
Le temple étant l’endroit où la présence divine réside alors qu’il est dit: » la présence de Sa lumière se trouve dans les hauteurs élevées » et là-bas est Sa résidence principale.
Malgré cela. La présence divine réside dans le temple comme le verset le dit: « et faites-moi un temple et je résiderai parmi vous. » C’est l’endroit sur terre où se matérialisent des actes célestes. Cet endroit est le lien entre la terre et les cieux et qui a été créé par Ses deux mains.
La גמרא(le Talmoud/ La Guémara) pose alors une question: il y a écrit: » ויבשת ידיו יצרו » « et la terre sèche Ses mains l’ont créée »? Et donc toute la terre a été créée par Ses deux mains pas seulement le temple! Il est répondu qu’en fait il est écrit « ידו יצרו » sa main l’a créée » et non « ses mains » (le sujet est écrit au singulier alors que le verbe est au pluriel).
Pourtant il est écrit « יצרו » elles l’ont créée » au pluriel.
La réponse est en fait que ce sont les doigts de sa main qui ont créé le monde. Les cieux et la terre ont été créés par ses « doigts » comme il est dit: » כי אראה שמיך מעשי אצבעתיך י » « car j’ai montré les œuvres de tes doigts« . Et lorsqu’il est dit « ידיו » cela veut dire « les doigts de sa main ». Alors que le temple a été construit par ses deux mains comme il est dit « מקדש הי כוננו ידיך » (le temple saint D-ieu tu l’as installé de tes mains ) c’est-à-dire avec ses 10 « doigts », les 5 doigts qui ont créés les cieux et les 5 doigts qui ont créés la terre.
Dans le langage saint, לשון הקדש, le mot » destruction » » חרבן » vient du mot « יובש » « sec » « חרב » » détruire ».
A propos du verset: » וחרה אף הי בכם » » et la colère divine s’abattra sur vous », il est expliqué dans Rashi רש״י que la racine du mot « חר » » colère » vient du mot « חום » » chaleur » qui provoque « l’évaporation » des éléments. Une ruine « חרבה » est un endroit complètement sec. « חרון אף » « la colère » est l’expression de quelque chose qui passe par le feu. La destruction passe par le même principe de séparation de ce qui était associé.
Lorsque les éléments sont reliés entre eux, il y a un élément extérieur qui les réunit: un liquide. Celui qui veut faire à partir de farine, une pâte, est obligé d’y associer de l’eau. Celui qui veut à partir de la terre faire de l’argile, doit y mélanger de l’eau.
Nous apprenons donc de cela que la « destruction » est une action qui atteint cette notion de « liant » de « חיבור » qu’il y a entre les composants d’un objet. Ce lien disparaît. La destruction assèche et désolidarise les éléments composites de l’objet. Le » חרבן » la destruction, le « חרב » l’acte de détruire est l’acte inverse de l’unification « חבר ». Il y a beaucoup de racine de mots dans le לשון הקדש, qui s’utilisent pour indiquer une action et son contraire comme dans notre sujet: » חרב » « détruire » et « חבר » » relier » (qui ont les mêmes lettres).
Si la construction, c’est-à-dire l’unification, qui est le principe même du temple, s’est faite avec 10 doigts cela veut dire que chaque doigt à une énergie créatrice en elle-même.
Nous nous rappelons encore du récit de פסח(Pessa’h = Pâques) où les égyptiens en Égypte ont été frappés par un « doigt » et sur la mer par la « main ». Chaque doigt est une énergie qui agit séparément.
Lorsque nous associons les 10 doigts, une complète destruction se matérialise en parallèle à une unité complète. C’est ce que veut nous enseigner la משנה (Mishna). Les 5 événements du 17 תמוז(17 Tamouz) et les 5 autres événements du 9 אב(9 Av) sont les 10 énergies qui vont agir pour détruire cette union façonnée par les 10 énergies créatrices qui est le principe même du temple. Ceci a été appris du verset: » כל רפדיה השיגוה בין המצרים «Ses persécuteurs, tous ensemble, l’ont atteint d’entre les deux limites », d’entre ces deux jours qui s’unissent et s’associent en une action unique qui est avec un début et une fin. Un cheminement qui commence le 17 תמוז et qui se termine le 9 אב.
La משנה(Mishna) vient nous enseigner que derrière ces 10 événements se cachent ces 10 énergies qui ont façonné la destruction complète d’une œuvre qui a été construite et fondée par 10 énergies créatrices qui ont introduit dans les fondations du temple chacune, sa propre force.
Toutes ces énergies ont été reprises et abandonnées. C’est sa construction et c’est sa destruction. C’est le « חבר » l’unification, la construction et c’est le « חרב » la destruction, la dislocation.
Dans le verset: » אלה תולדות השמים והארץ בהבראם » » voici les enchaînements des cieux et de la terre dans leurs créations ». Nos sages expliquent le mot « בהבראם » ainsi: » ב״ה״ בראם » » par la lettre « ה » les cieux et la terre ont été créés ». Si l’on peut s’exprimer ainsi, D-ieu a créé la création avec la lettre « ה » (qui a pour valeur numérique 5). Et ceci entraîne donc qu’il y a 5 « ה » énergies qui ont donné existence à la création.
Le גאון מולנ״א, le gaon de vilna, enseigne que D-ieu a créé le monde par la parole « שהכל נהיה בדברו ». Le maître du monde a créé le monde par des phrases, par 10 phrases בעשרה מאמרות. La base de chaque phrase est une association de lettres. Ainsi parle-t-on. La notion de parole « דיבור » est de faire entendre des mots qui sont eux-mêmes, une association de lettres. Les phrases sont construites par une association de mots, des chapitres sont construits par une association de phrases et des livres sont construits par une association de chapitres. La base de toute cette construction étant l’association de lettres qui formeront des phrases. C’est la première des associations.
A propos de בצלאל Betsallel qui a construit le משכן, la résidence divine dans le désert et ses ustensiles, il est dit: » et je le remplirai de souffle divin par la sagesse חכמה l’intelligence תבונה et la connaissance דעת ». Ainsi sur D-ieu, il est dit: » D-ieu avec sagesse בחכמה, il a fondé la terre, formé les cieux avec intelligence בתבונה et pas sa connaissance בדעת, il a creusé les abîmes ».
Nos sages enseignent que בצלאל(Betsalel) savait associer les lettres avec lesquelles les cieux et la terre ont été créés. La construction du משכן, de la résidence divine ressemble en quelque sorte à la construction des univers. Les mêmes actes de création.
Il est connu que D-ieu s’est arrêté de créer le 7ème jour et ainsi il nous est ordonné de chômer le שבת mais nous ne savons pas quels actes créateurs הי a réalisés pour créer son monde afin que nous puissions nous abstenir de créer pendant le שבת. Pour cela nous chômons des travaux qui ont servi à la construction du משכן. Nous nous abstenons de créer de ce que בצלאל a accompli pour la construction du משכן car les actes de la création des univers et de la construction du משכן sont les mêmes.
Ces actes de créations ont été élaborés par l’association de certaines lettres de l’alphabet. Tout a été créé par des paroles « הכל נהיה בדברו ».
Le גאון מולנ״א(Gaone de Vilna) rajoute que la création s’est faite non seulement par la signification des lettres mais aussi par la valeur numérique des lettres.
Le Créateur a créé son monde non seulement par l’expression de la lettre telle qu’elle est exprimée et tout ce qui se propage d’elle et de sa lumière mais aussi par sa valeur numérique.
Dans les paroles du גאון, il est écrit que du compte du א-ב, de l’alphabet, il en ressort le compte exact de la durée de ce monde qui est de 6000 ans. Puisque le créateur a créé le monde avec les lettres de l’alphabet et que du compte de ces lettres il en ressort le chiffre de 6000, il est donc logique que le monde a été créé pour 6000 ans.
Lorsque nous disons que le monde a été créé par la lettre « ה » comme nous l’avons enseigné précédemment
« ואלה תולדות השמים והארץ בהבראם »
« ב״ה״ בראם », Il y a donc ici une évidence que la création s’est étendue et s’est développée par le moyen de 5 choses car la valeur numérique de la lettre « ה » est 5.
Le גאון מולנ״א(Gaone de Vilna) enseigne dans un autre endroit que le nom saint par qui le monde a été créé est le nom « הוי״ה » c’est-à-dire avec la lettre « י » puis la lettre « ה » puis la lettre « ו » et enfin la lettre « ה ». Le nom entier et explicite (שם המפורש) est composé des lettres dans son « remplissage ». C’est-à-dire lorsque nous prononçons la lettre « י »
Nous l’épelons « יו״ד » et « ו״ו » et « דל״ת ». Et lorsque nous prononçons la lettre « ה » nous l’épelons « ה״א », le « ו » s’épelle « ו״ו » et enfin de nouveaux un « ה״א ».
Le גאון commence son exposé en rapportant que toute existence commence dans un plan euclidien. Toute existence commence par un point (נקודה) qui est représenté par le « י » qui devient un trait « קו » qui est représenté par le « ו » pour former un plan (שטח) qui est représenté par le « ד » (2 axes) pour devenir une profondeur (עומק) qui est représenté par le « ה » (3 axes).
Le point ne prenant pas de place dans l’espace, c’est un concept purement intellectuel base des mathématiques qui ne prend forme que dans l’esprit. Ce même esprit qui saisit des notions hautement supérieures est capable d’appréhender ces notions appelées « נקודה » « point » et « קו » « trait ». Car un point ne peut se définir dans un espace matériel de même que le trait qui est une association de deux points. La matière s’appréhendant dans un plan à trois dimensions hauteur, largeur et profondeur. Un point n’a aucune de ces dimensions donc complètement conceptuel, c’est le « י ». En appliquant une direction à ce point, se crée le trait qui n’a qu’une seule dimension, la hauteur, donc n’étant toujours qu’au niveau du concept, c’est le « ו ». De même que le plan (שטח) ne prend pas de place dans l’espace car n’ayant que deux dimensions, la hauteur dû à la direction créée par le point et la largeur dû à la direction vers le côté créée par le trait. Ce plan étant représenté par le « ד ». Le « ו » qui se déplace vers un côté créant la barre du « ד ». Toutes ces notions ne prennent pas de place dans l’espace et n’existent que dans le monde de la pensée. Dans la matière, il ne peut se concevoir un objet à une ou deux dimensions.
Le nom divin explicite commence par la lettre « יו״ד »: le « י » étant la conceptualisation du point (נקודה), le « ו » étant la conceptualisation du trait (קו) et le « ד » étant la conceptualisation du plan (שטח). Tout n’est que pensée.
C’est ce qui peut se comprendre des mots de רש״י sur le chant de la traversée de la mer « אז ישר משה » » alors chantera Moshé »: » le « י » indique la dimension de la pensée ». Le « י » est employé pour indiquer le futur. Il transforme le verbe au futur: »שר » « il chante » en « ישיר » » il chantera ». Le futur n’existe que la dimension de la pensée, cela n’est qu’un concept intellectuel. Le « יו״ד » représentant la dimension de la pensée. Si cela se matérialise, cela ne reste plus dans le futur mais se transforme en présent, la pensée se matérialisant en descendant dans la matière, prenant place dans la dimension de l’espace.
Ainsi רש״י explique « אז ישיר »: « il aurait été plus judicieux d’écrire « אז שר » » alors il chante » pourquoi avoir écrit au futur « אז ישיר »? Cela veut dire en fait qu’il est monté à l’esprit de משה de chanter ». C’est-à-dire que משה s’est élevé dans la dimension de la pensée pour pouvoir exprimer son chant.
Tout commencement de chaque existence, tout point de départ de la matérialisation de la réalité dans ce monde est « le point », la נקודה qui prend naissance dans une dimension autre que les trois dimensions qui matérialisent notre univers.
Le point, la נקודה, est toujours quelque chose qui n’est pas en développement mais le principe même, l’essence même qui va donner naissance à la matérialisation de la création et qui ne prend pas de place dans la matière. Ce point d’énergie n’a pas de réalité dans le monde physique mais est l’essence même de ce monde. Pour cela, l’existence de ce monde a pour point de départ le « י » le « ו » et le « ד » de la lettre « י » (l’essence de ce que les scientifiques appellent le « big-bang » et ce que nos sages appellent le צימצום- restriction de la lumière).
Après ces deux dimensions: le « קו » le « trait » représentant la hauteur et le « שטח » » le plan » représentant la largeur, il y a une troisième dimension le « עומק » la « profondeur » qui est le passage à la matérialisation de la création et qui est représenté par la lettre « ה » qui est formée des 2 « ו » qui forment le plan et d’un autre « ו » qui va permettre à la profondeur de se matérialiser ( le big-bang, צמצום proprement dit)
Cette matérialisation, ce passage du monde de la pensée au monde de l’action est caractérisée par la lettre « ה״א » comme à propos de ce qu’a dit יוסף(Yossef) aux égyptiens: » וזרעתם את האדמה הא לכם זרע » » voici pour vous de l’engrais et semez la terre ». Le mot « הא » signifie « prend » c’est-à-dire cette notion de transfert, de passage à la matérialité même qui est une dissociation d’avec l’unité de l’immatérialité. Le passage à la dualité qui crée alors la subjectivité.
L’essence de la forme se trouve dans le « א » de la lettre « ה״א » c’est-à-dire la manière comment la chose va se percevoir. Et le « יו״ד » et le « ה״א » étant la première partie du nom divin.
Toute existence tire sa réalité du point, de la נקודה, qui est l’essence même de la matière.
Le trait, le קו: si l’on veut utiliser le vocabulaire d’Euclide, lorsque le point se met en mouvement, il crée le trait et lorsque le trait se met en mouvement, il crée le plan (d’où son nom » plan euclidien ») qui lui-même grâce au mouvement va créer la profondeur le עומק. Cette même profondeur va donner la possibilité à cette chose de se matérialiser et de devenir un objet qui pourra de transmettre de main en main. Cette transmission est l’énergie qui se trouve dans le « ה״א ».
Lorsque le point se déplace, il crée le trait et le trait en se déplaçant de côté crée le plan qui lui va se déplacer dans une direction qui n’existe pas encore, vers la profondeur. Cette même profondeur va donner la possibilité à la matière de se transmettre de main à main.
Lorsque nous affirmons que le point crée le trait, cela veut dire que le point est essence même de la création. Le trait qui est créé- toute chose dans le monde n’est créé pour être ce qu’il est mais pour un but précis. Ainsi le point engendre le trait obligatoirement car la נקודה oblige le mouvement.
Pour celui qui comprend c’est en fait la dimension du temps dans toute chose. C’est la première chose qui est sorti du point.
Le גאון מולנ״א(Gaone de Vilna) explique les paroles de la מסכת ראש השנה(traité de Talmoud Rosh Hashana) qui sont: » le premier verset de la תורה: « au commencement, D-ieu créa le ciel et la terre- בראשית ברא אלקים את השמים ואת הארץ » est aussi une parole de création ( bien qu’il n’est pas écrit le mot ויאמר). Qu’a-t-il été créé dans cette parole? La notion de temps. Le point de commencement qui a une continuation qui perdure dans un cheminement.
C’est la première chose qui est sortie du point qui est l’essence même de l’existence. Comme si nous disions que le point qui se trouve dans le « ב » du mot « בראשית » a créé le « ראשית » (commencement). La נקודה créant בראשית c’est-à-dire le temps.
Le קו, le trait est la continuation du temps, c’est-à-dire le mouvement dans la durée.
Le créateur du monde est appelé
» מגיד מראשית אחרית » » celui qui prolonge du début vers la fin ». Le mot « מגיד » veut dire mettre une notion de mouvement dans la création comme dans l’expression « גדה של נהר » « le courant du fleuve ». Un flux qui se projette du début à la fin de la création. Il projette le commencement vers la fin. Le temps est une création de la נקודה, du point afin que celui-ci aille vers son but qui est le קו, le trait.
Le שטח, le plan est l’espace. La chose s’étend, et doit s’étendre. La notion d’espace est en fait la notion de plan. Le קו est la notion de déplacement, de mouvement, le שטח est la notion d’espace. Le temps et l’espace sont les deux notions qui sont liées à toute réalité physique. Le continuum espace-temps.
La troisième dimension étant déjà la transmission. C’est déjà la réalité physique qui est donnée à la matière de se transmettre de main à la main.
Comment cette action de transmission se matérialise-t-elle? Il y a deux manières de voir de même qu’il y a deux mains. La main droite et la main gauche. La main droite agit, crée le mouvement et la main gauche préserve, garde. La main gauche aidant, préserve afin que l’objet ne tombe. La gauche n’est pas elle-même l’action, la droite oui.
Ici nous touchons aux deux manières de préhension. Une avec la droite qui est la préhension par l’action et l’autre avec la gauche qui est la préhension par la prévention. La gauche repousse tout celui qui veut prendre ce qui ne lui revient pas alors que la droite rapproche, agit.
La création elle-même, la dimension du temps et la dimension de l’espace n’existent que d’un point de vue intellectuel. Ce n’est qu’une vue d’esprit.
La perfection de cette création se transformant en matière physique, devenant un objet de transmission, se fait de deux manières: la main droite et la main gauche, l’action est la perfection dans le monde physique représenté par la main droite. La main gauche représentant la garde de ce qui a déjà été créé dans ce monde physique. La droite invente, c’est le domaine de l’action la gauche c’est le domaine de la retenue. La droite correspond aux מצוות positives et la gauche aux מצוות négatives.
Le point, la נקודה qui a amené au חרבן, à la destruction du temple a été la brisure des tables de la loi, שבירת הלוחות qui a été le point, la נקודה qui a engendré la destruction de מתן תורה, du don de la תורה.
Les tables ne sont pas des pierres sur lesquelles ont été écrites les paroles. Les paroles au moment même de leurs émissions se sont matérialisées en écrit, les tables se créant à ce même moment par la chaleur de la parole qui se matérialisait en écrit. C’est ce que veut dire « רואים את הקולות » » ils voyaient les sons ». La parole étant un souffle d’air qui par la chaleur du feu a transformé l’air ambiant en saphir et ainsi les paroles se sont incrustées dans l’air.
Le תרגום יונתן בן עוזיאל(Targoum Yonathan Ben Ouziel) explique que les paroles qui ont été entendues au moment du son de la תורה sont sorties du mont Sinaï et ont tourné tout autour du camp d’Israël pour enfin s’incruster dans les tables. Tout celui qui a vu les premières tables au moment de sa brisure a vu les paroles. En vérité peu nombreux sont ceux qui ont vu cela. Il se peut que seul (Moshé Rabbénou) משה רבינו ait vu les paroles s’envoler.
La brisure des tables a fait que ces paroles, ces lettres se sont envolées dans l’air. Elles ont disparues. Ce qui reste de ces paroles est la voix céleste בת קול qui est sortie du mont h´orev. C’est-à-dire le son qui sort de la voix qui parle. בת קול, la fille de la voix.
La brisure des tables est la destruction du don de la תורה(Torah) sur le mont Sinaï. De ce point, שבירת הלוחות(brisure des Tables) est sorti un trait, בטל התמיד, l’annulation du sacrifice journalier au temple.
Il est écrit: » עלת תמיד העשיה בהר סיני »
« L’holocauste journalier qui a été approché au mont Sinaï » et depuis ce moment les sacrifices ne se sont pas interrompus.
Le 17 תמוז (17 Tamouz), a été annulé le sacrifice journalier. Ce ne sont pas les sacrifices qui sont appelés « תמיד » qui ont été annulés mais la notion de « תמיד » de « continuité » qui a disparu. Et même lorsqu’ils ont approché de nouveaux les sacrifices journaliers dans le 2ème temple, la notion de « תמיד » « continuité » n’était pas revenue. Car « תמיד » est la continuation de la tenue au mont Sinaï, המשך של מעמד הר סיני.
La continuation de « la tenue au mont Sinaï » est la dimension du temps. Le Sinaï étant une création sans interruption.
« Seulement garde toi de peur d’oublier les choses que tes yeux ont vu et de peur qu’elles se retirent de ton cœur tous les jours de ta vie et tu feras connaître à tes enfants et à tes petits enfants le jour où tu t’es tenu devant D-ieu à h´orev«
Il est impossible de se séparer même un seul instant de ce moment du don de la torah. Nos yeux et notre cœur doivent être là-bas tous les jours. C’est une des מצות(Mitsvoth) négatives de ne pas oublier ce moment. « תמיד » (continuellement).
C’est le קו qui est sorti de la réalité de la destruction. Nous avons déjà dit que les matérialisations de la destruction sont le contraire des matérialisations de sa construction ; « חרב » étant l’inverse de « חבר ».
Ce « תמיד » cette énergie qui faisait que ce moment du don de la torah se matérialise à tout moment, s’est annulé ce 17 תמוז. Cette dimension du temps qui a le pouvoir de faire vivre le don de la torah à chaque instant, a disparu.
La dimension de l’espace: le mont Sinaï. Où est l’espace où s’est tenu le mont Sinaï? L’endroit est le « היכל » « et vous me ferez un temple et je résiderai parmi vous » ce même honneur qui est apparu au Sinaï est le même honneur qui s’est dévoilé au משכן et au temple.
Le היכל est l’endroit du service intérieur, là-bas se trouvent l’autel intérieur מזבח, la table des pains de proposition שלחן et aussi le candélabre, מנורה. Celui-ci est la lumière de la torah car sa lumière est un témoignage que la présence divine réside sur Israël. Là-bas se trouve l’endroit, cette notion d’espace.
La destruction de l’endroit s’est matérialisée lorsqu’une idole a été installée dans le היכל. Ainsi a été détruit l’endroit. L’endroit qui devait être l’endroit où la torah devait être formée, a été détruit.
Nous venons de parler du point, נקודה, du trait, קו et de l’espace, שטח. Maintenant nous devons parler de la 3ème dimension qui est la profondeur et de la droite et de la gauche.
Aposthémus a brulé la torah. Depuis, il est possible que la torah puisse être brûlée soit volontairement soit par inadvertance. Si ce mécréant n’avait pas brûlé la torah le 17 תמוז, [cet acte étant le déclencheur de la destruction de la réalité de la torah], il aurait été impossible qu’elle puisse être brûlée. Car la torah, il est impossible de la toucher. La torah est une torah divine et il est impossible qu’une personne physique puisse la détruire et la faire disparaître du monde. C’est un objet saint avec la sainteté de la torah.
Le רמב״ם écrit: » les choses qui sont dans les tables de l’alliance sont les mêmes qui sont dans chaque livre de torah. Tout livre (rouleaux) de torah porte en lui la sainteté des tables de l’alliance. »
Et donc, si ce n’est que les tables aient été brûlées, il aurait été impossible de brûler la torah. Il aurait même été impossible d’avoir l’idée de vouloir la brûler.
Le verset décrit la torah ainsi: »מימינו אש דת למו » « de Sa droite sort le feu de Sa loi pour Son peuple« . La loi est entièrement feu.
Nos sages enseignent ainsi: » si ce n’est que leur loi n’était pas de feu, si la torah n’avait pas été donnée à Israël, aucun peuple ni aucun langage n’aurait pu se tenir devant Lui ».
L’endroit où se trouve la torah est un feu dévorant où personne ne peut se tenir devant lui. Si ce n’est que la torah ne nous avait pas été donnée afin de pouvoir l’étudier, aucune personne ne pourrait se tenir devant elle à cause du feu qu’elle dégage.
« מימינו אש דת למו » (de Sa droite sort le feu de Sa loi pour Son peuple). Cette même droite a été détruite lorsque ce mécréant a brûlé la torah. Le feu ne peut brûler le feu. La torah est feu. La droite est entièrement « action ». Le feu n’a pas de réalité propre. La גמרא(Le Talmoud) dit que le feu n’est pas matière « אין לה ממשא ». Ce n’est pas de la matière mais une action. Le feu est le côté droit. Le monde de l’action et c’est ceci qui a été détruit.
Le dernier événement du 17 תמוז a été la brèche dans la muraille du temple. C’est-à-dire que la garde, la שמירה a été annulée. Yérouchalaïm (Jérusalem) a été abandonnée, elle est devenue un domaine public où toute personne pouvait s’introduire. La main gauche est la main qui s’occupe de préserver. La gauche repousse. Cette muraille qui repoussait tout celui qui voulait rentrer, a été détruite.
Ce sont les 5 événements qui ont entraîné la destruction des 5 actions qui ont fait que le monde s’est créé.
Ce qui est arrivé le 17 תמוז est la destruction de la torah, destruction de la royauté. La destruction de la matérialisation de la torah dans ce monde.
Dans une prochaine publication nous développerons les événements qui se sont déroulés le 9 Av.
L’article original a été publié sur le site de Rav Smadja avec son aimable autorisation.
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