Règles relatives aux bénédictions du matin – N°3
(selon le Hala’ha Béroura sur Shoul’han ‘Arou’h O.H chap.46)
« Shélo ‘Assani Goï/Goya » ; « Shélo ‘Assani ‘Aved/Shif’ha » ;
« Shélo ‘Assani Isha/Shé‘assani Kirtsono »
Résumé
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Parmi les bénédictions du matin, nous récitons 3 bénédictions particulières :
« Shélo ‘Assani Goï/Goya » (« qui n’a pas fait de moi un non juif/non juive ») ; « Shélo ‘Assani ‘Aved/Shif’ha » (« qui n’a pas fait de moi un serviteur/une servante ») ; « Shélo ‘Assani Isha/Shé‘assani Kirtsono » (« qui n’a pas fait de moi une femme/Qui m’a faite selon sa volonté »).
Nous devons à priori veiller à réciter ces 3 bénédictions dans cet ordre.
Si toutefois on a inversé l’ordre de l’une de ces 3 bénédictions, on peut malgré tout réciter la suivante.
A la place de « Shélo ‘Assani Isha », les femmes disent (sans Shem Ou-Mal’hout, c’est-à-dire, sans les mots « Ata A.D.O.N.A.Ï Eloh-énou Mele’h Ha-‘Olam) Barou’h Shé’assani Kirtsono (« qui m’a faite selon sa volonté »),
Par contre, les femmes disent les 2 autres bénédictions (« Shélo ‘Assani Goï » et « Shélo ‘Assani ‘Aved ») sous leur forme au féminin (« Shélo ‘Assani Goya » et « Shélo ‘Assani Shif’ha »), mais avec Shem Ou-Mal’hout.
Une personne convertie au judaïsme ne peut pas réciter la bénédiction « Shélo ‘Assani Goï (Goya) », sauf si sa mère s’est convertie au judaïsme avant de tomber enceinte.
Développement
Il est enseigné dans la Guémara Ména’hot (43b) :
Nous sommes tenus de réciter 3 bénédictions précises chaque jour.
« Shélo ‘Assani Goï » (« qui n’a pas fait de moi un non juif ») ; « Shélo ‘Assani ‘Aved » (« qui n’a pas fait de moi un serviteur ») ; « Shélo ‘Assani Isha » (« qui n’a pas fait de moi une femme »).
C’est ainsi que tranche MARAN dans le Shoul4han ‘Arou’h (O.H 46-4).
Dans quel ordre doit-on réciter ces 3 bénédictions ?
Dans le Beit Yossef (O.H 46), MARAN explique au nom de la Guémara (Ibid. 44a) que l’ordre de ces 3 bénédictions est progressif au niveau de l’importance spirituelle de ces 3 types d’individus :
Le Goï est le moins important du fait qu’il n’est soumis à aucunes Mitsvot.
Le serviteur est plus important que le Goï puisqu’il est soumis au même Mitsvot que les femmes (donc, exempt de toutes les Mitsvot liées au temps), mais moins important que la femme, puisque le serviteur reste soupçonnable de vol (voir Pirké Avot chap.2 Mishna 8)
La femme est uniquement exempte des Mitsvot liées au temps.
Que faire si l’on n’a pas respecté l’ordre de ces 3 bénédictions ?
Puisque l’ordre de ces 3 bénédictions est progressif, il serait logique que l’on ne puisse plus réciter la bénédiction suivante si l’on a devancé l’une ou l’autre de ces 3 bénédictions.
C’est effectivement l’opinion de certains décisionnaires comme le Maguen Avraham (fin de la note 9).
Mais le TAZ (Touré Zahav) (note 6) tranche que Bédi’avad (à postériori), même si l’on a récité d’abord « Shélo ‘Assani Isha », on peut encore réciter les bénédictions de « Shélo ‘Assani Goï » et « Shélo ‘Assani ‘Aved », puisque le Goï et le serviteur ont une supériorité sur la femme, car le Goï peut se convertir et devenir totalement soumis aux Mitsvot, et le serviteur peut s’affranchir et devenir lui aussi totalement soumis à l’intégralité des Mitsvot, alors que la femme n’a pas la moindre possibilité de devenir un jour soumise à la totalité des Mitsvot.
De même, si l’on à d’abord récité la bénédiction de « Shélo ‘Assani ‘Aved » avant de réciter la bénédiction de « Shélo ‘Assani Goï », on peut aussi encore la réciter, puisque le Goï garde une supériorité sur le serviteur, car le Goï possède une lignée, alors que le serviteur n’en a pas.
Tel est l’avis de nombreux autres décisionnaires.
C’est ainsi que tranche notre maitre le Rav Ovadia YOSSEF Shalita dans son livre Hali’hot ‘Olam (tome 1 Vayeshev note 5 page 55).
Que doivent dire les femmes à la place de « Shélo ‘Assani Isha » ?
Les femmes disent « Shé’ssani Kirtsono » (« qui m’a faite selon sa volonté »).
Cette bénédiction n’apparait pas dans le Talmud, mais prend sa source dans les propos du TOUR, qui explique qu’en prononçant ces mots, la femme accepte la décision Divine à son égard.
Effectivement, nous savons que la femme est exempte des Mitsvot positives liées au temps, ce qui la prive d’un bon nombre de Mitsvot.
Elle exprime donc par cette bénédiction qu’elle accepte son état de femme, même si cet état la prive des récompenses aux Mitsvot, desquelles elle est exempte.
Mais dans ses commentaires sur Kiddoushin (chap.1 sect.41), le ROSH écrit que l’on ne doit pas réciter une bénédiction qui n’apparait pas dans le Talmud.
Même si certains décisionnaires – comme le TAZ (note 4) ou le Péri Mégadim (Mishbetsot Zahav (note 4) – maintiennent qu’il faut réciter cette bénédiction en mentionnant Shem Ou-Mal’hout (avec « … Ata A.D.O.N.A.Ï Eloh-énou Mele’h Ha-‘Olam … »), d’autres décisionnaires – comme le Gaon auteur du ‘Havot Yaïr dans son livre Mékor ‘Haïm (note 4) ou le RADBAZ (dans son livre Métsoudat David (Mitsva 74) – tranchent que les femmes ne doivent pas réciter cette bénédiction en mentionnant Shem Ou-Mal’hout.
Telle est l’opinion de nombreux autres décisionnaires.
C’est cette opinion qu’il faut retenir comme essentielle selon la Hala’ha.
Les femmes doivent-elles réciter avec Shem Ou-Mal’hout les 2 bénédictions au féminin « Shélo ‘Assani Goya » et « Shélo ‘Assani Shif’ha » (qui remplacent « Shélo ‘Assani Goï » et « Shélo ‘Assani ‘Aved » dites par les hommes) ?
Il existe effectivement une divergence d’opinion parmi les décisionnaires sur ce point :
Selon le Péri ‘Hadash et notre maitre le ‘HYDA dans son livre Kesher Godal (chap.5 note 22), les femmes doivent réciter ces 2 bénédictions (sous leur forme au féminin) avec Shem Ou-Mal’hout.
Par contre, selon le Gaon Ya’bets dans son Siddour, les femmes ne doivent pas mentionner Shem Ou-Mal’hout pour ces 2 bénédictions.
De plus, le Kaf Ha-‘Haïm (sur O.H 46 note 42) fait mention de l’opinion du ‘Olat Shabbat selon qui les femmes ne doivent pas mentionner Shem Ou-Mal’hout pour ces 2 bénédictions puisque la forme au féminin de ces 2 bénédictions n’apparait pas dans le Talmud (car dans la Guémara Ména’hot 43b citée plus haut, ces 2 bénédictions sont sous une forme au masculin).
Puisqu’il y a divergence d’opinion, il faudrait apparemment trancher que les femmes ne doivent pas réciter ces 2 bénédictions avec Shem Ou-Mal’hout, selon le principe « Safek Béra’hot Lé-Hakel » (en cas de doute, on ne récite pas de bénédiction).
Mais en réalité, il semble que le Kaf Ha-‘Haïm n’a pas porté sa sainte attention aux propos de Rabbenou Yossef ‘HAÏM (l’auteur du Ben Ish ‘Haï) dans son livre ‘Od Yossef ‘Haï (Vayeshev, note 9) où il atteste explicitement que telle est la tradition répandue de réciter ces 2 bénédictions avec Shem Ou-Mal’hout.
Or, lorsque nous sommes face à une tradition (dans le sens Hala’hique du terme, c’est-à-dire, une tradition instaurée par une autorité rabbinique, et dont on possède une traçabilité dans les livres des décisionnaires) de réciter une bénédiction, nous n’appliquons pas le principe de « Safek Béra’hot Lé-Hakel ».
De plus, le fait de mettre ces 2 bénédictions au féminin n’implique en rien l’interdiction de modifier la forme verbale instaurée par nos maitres dans les bénédictions (voir entre autres Shou’t ’Hazon ‘Ovadia tome 1 chap.38 dans la note page 705).
Est-ce qu’une personne convertie au judaïsme peut réciter la bénédiction « Shélo ‘Assani Goï (Goya) » ?
Ceci fait l’objet d’une divergence parmi les décisionnaires :
Le Or’hot ‘Haïm (règles relatives aux cent bénédictions Hal.8) et Rabbenou David ABOUDARHEM (Seder Sha’harit des jours de semaine) cite la décision Hala’hique de Rabbenou Méïr Ha-Levy selon laquelle, une personne convertie ne peut pas réciter cette bénédiction, tant que sa conception et sa naissance n’ont pas eu lieu dans la sainteté (Si sa mère était enceinte lorsqu’elle s’est convertie au judaïsme, l’enfant ne pourra pas réciter cette bénédiction. Par contre, si la mère s’est convertie avant de tomber enceinte, l’enfant récitera cette bénédiction.)
Il est vrai que le Péri ‘Hadash (note 4) autorise la personne convertie au judaïsme à réciter cette bénédiction, cependant, le Péri Mégadim (Eshel Avraham note 10) objecte sur ses propos à partir de la décision Hala’hique de Rabbenou Méïr Ha-Levy citée précédemment et selon laquelle, tant que sa conception et sa naissance n’ont pas eu lieu dans la sainteté, elle ne peut pas réciter cette bénédiction.
Telle est également l’opinion du RAMA (O.H 46-4), et de notre maitre le ‘HYDA dans son livre Birké Yossef (note 9).