Paracha Tolédot Rabbi Yérouham Leïbovitch – Grandeur et décadence –
Paracha Tolédot Yérouham Leïbovitch
Cours de Rabbi Yérou’ham Zatsal (Machguia’h de la Yéshiva de Mir).
Paracha Tolédot Rabbi Yérouham Leïbovitch
Traduit et adapté par Rav Michael smadja
Ce cours est la suite du cours : Je suis un mur: le principe des patriarches
Un grand principe est entre nos mains: pouvoir atteindre l’infini comme pouvoir rester dans une étroitesse d’esprit. Le Sabba de Kelm explique que la différence entre le juste et le mécréant se fait sur ce principe. Autant l’homme ressent la grandeur de D-ieu, vit dans la grandeur de D-ieu autant il est grand mais il n’est que ce qu’il veut être et pas plus. Sa perception de la vie transpire son niveau spirituel.
Le Rambam explique de la manière suivante : « comment peut-on arriver à craindre réellement Hachem ? Par la réflexion sur la complexité des créatures et la grandeur de leur sagesse…. De suite la crainte apparaît ». (Comment un être humain est composé: cellules ADN. Neurones microcosme de toute la nature de l’infiniment petit à l’infiniment grand, observation au microscope au télescope) (la technologie, les sciences de la physique, les protons, les neutrons, l’électricité, la médecine, l’astronomie ….) Nous voyons que la crainte ne surgit que de la grandeur. De l’infiniment grand naît la crainte. Lorsque nous disons « le D-ieu qui est grand » il est évident que nous ne voulons pas exprimer sa dimension physique car il est sans forme mais nous parlons de Son essence, Sa qualité profonde, Son éternité. La notion de grandeur ne peut s’appliquer à une forme car elle-même est limitée par ses propres traits. La grandeur ne s’applique qu’aux choses sans limites, à l’éternité, à l’infini. Et donc la création dans sa perception physique n’est pas éternelle n’est pas « grande ». Comment alors percevoir la grandeur de D-ieu dans ce monde ? Hachem par son immense bonté et son incroyable sagesse a créé les univers et les mondes de telle manière que le corps puisse ressentir par sa perception sensorielle le goût de l’éternité. Comme le chante le roi David: « pour faire connaître à la race humaine ses puissances et l’honneur magnifique de sa royauté« . Car il y a un principe dans la création qui veut que la création elle-même doit obligatoirement percevoir la crainte de D-ieu. Et donc, cette grandeur de D-ieu peut se ressentir dans la forme. Cette éternité est insérée dans des limites. La forme serait tout simplement le reflet de l’éternité comme la buée sur une vitre qui fait apparaître une forme et qui disparaît une seconde après. Comme la « manne » nourriture céleste dans le désert qui apparaissait tous les matins enveloppée dans une fine couche de givre qui s’évaporait à la chaleur du soleil pour laisser place à l’éternité représentée par la « manne ».
Cette éternité peut se percevoir par le corps au moyen de la forme, plus la forme est grande plus elle se multiplie, plus il y a cette impression de grandeur qui s’instaure dans l’esprit de l’homme qui va engendrer en lui cette peur et cette crainte de l’éternel. Lorsque nous ne percevons plus nos limites, nous avons cette illusion d’être dans l’éternité. La peur du vide, la peur du lendemain car au-delà des limites. Ce sentiment d’être éternel car ne connaissant pas le jour de notre fin physique, est la résultante de cette éternité qu’il y a en nous. Incroyable cette bonté qui est aussi infinie, que nous octroie Hachem en mettant l’infini dans le fini. En nous donnant la possibilité de toucher l’infini et l’éternité dans l’impermanence de ce monde. Car qui dit « mouvement » dit « commencement » et donc « fin« , donc monde limité et malgré cela pouvoir goûter à l’intemporalité de la réalité uniquement par cette impression superficielle d’immensité de la matière soit dans sa forme soit dans sa complexité. Par la limitation elle-même de notre esprit, nous pouvons atteindre l’infini et toucher l’éternité.
Lorsque nous vivons dans l’éternité et que nous percevons l’éternité, alors la crainte devient réalité. Quel est l’espoir de l’homme qui vit dans l’étroitesse de son esprit, dans les cloisons fabriquées depuis sa plus tendre enfance ? Même la sainte Torah n’est que aggloméra de mots pêle-mêle. Où peut-il trouver la crainte de D-ieu si même la Torah n’est pour lui qu’une suite de lettres qui forment elles-mêmes des mots qui deviennent des phrases qui s’enferment elles-mêmes dans des notions certes abstraites mais limitées. Mais si nous vivons dans la grandeur, si nous percevons la grandeur de chaque chose, si nous essayons de capter ce qui est vaporeux et fuyant, si nous essayons de casser les barrières de notre esprit « formaté », approcher la Torah en tant que conduit qui nous mène à l’éternité alors peut-être avec l’aide d’Hachem, nous pourrons accéder à l’éternité qui transpire dans chaque recoin de la matière et qui nous fera accéder à la véritable crainte.
Prenons l’exemple de notre sainte Torah qui est remplie d’images corporelles (agshama) et Rashi explique que toutes ces images ne sont là que pour avoir une « poignée » « hah’iza » pour pouvoir percevoir l’infini et l’éternité qui se dégage de la Torah. Mais comment arriver à saisir cette éternité ? Comment atteindre par les mots de la Torah, l’infini et par ce biais ressentir cette crainte qui nous fait tellement défaut dans notre service quotidien ? Peut-être un début de commencement de crainte va-t-il naître en nous par cet exemple du Rambam tiré de son livre « le guide des égarés » car en vérité nous sommes tous des égarés au regard de notre service divin.
Le Rambam explique ainsi: « s’il te vient à réfléchir sur tous les attributs qui définissent Hachem dans la Torah tels que « la main » « le bras » « la colère » « la clémence » « les ailes des anges » « la vue » …..et que tu te demandes: « A quoi ressemble Hachem ? Voici il n’a pas de mains ni de bras ni de colère ni de clémence ni d’ailes ni d’yeux ! A ce moment précis, tu commences à te rapprocher de lui » car l’homme n’a aucune prise intellectuelle sur ses attributs. Aucune définition ne peut le cloisonner et le rendre perceptible par l’esprit et donc, il apparaît tel qu’il doit être: non-préhensible et donc infini. Alors la crainte va automatiquement surgir du plus profond de son être. Essayons de nous plonger dans cette image en fermant les yeux et nous pourrons faire surgir en nous cette impression de vide, d’illimité, de non-perception et alors la crainte surgira telle la lave d’un volcan. Comment est-on arrivé à ce sentiment d’éternité ? Par les mots de la Torah qui donnent une définition des attributs de D-ieu ! Mais comment ? En prenant le mot tel qu’il est bien évidemment mais en me posant les bonnes questions. Alors le mot prend tout son sens et l’éternité qui est insufflé dans le mot m’envahira et me remplira de crainte. Le « bras de D-ieu » ne désigne pas sa forme car il n’a pas de forme et donc à ce moment je me rapproche de l’éternité et de la crainte de cette éternité. Mais le « bras » désigne un attribut, c’est-à-dire comment la volonté divine se déverse sur la création, la conduite divine qui se concrétise dans ce monde. C’est ce que nous essayons de faire avec les explications du Malbim sur les versets de la Torah où chaque mot est disséqué et prend son véritable sens, un goût d’éternité. L’arbre au moment de la création avait le goût du fruit. L’écorce et le fruit sont « un » dans la création primordiale, le contenant est le contenu, le mot est l’essence même de ce qu’il veut définir.
Il est écrit: « Réouven est allé et a dormi avec Bilha la concubine de son père » Rashi explique que ces mots ne peuvent dire exactement ce qu’ils expriment. Mais du fait que Réouven est entré dans la tente de Bilha où son père avait installé sa couche après la mort physique de Rah’el alors Réouben a défait la couche de son père car celui-ci aurait dû installer sa couche dans la tente de Léa, la Torah considère l’acte de Réouven comme s’il avait dormi avec la concubine de son père.
Comment faire cohabiter les mots du verset avec son interprétation ? Il est vrai que si nous réfléchissons avec notre cerveau limité, avec notre étroitesse d’esprit, l’interprétation n’est pas en adéquation avec les mots du verset. Car quel rapport y a-t-il entre le fait de défaire la couche et le fait de dormir ! Les faits sont cloisonnés séparés. Le mot « défaire » n’a pas la même signification que le mot « dormir » ! Cela est vrai lorsque nous sommes enfermés dans nos préjugés, nos définitions sommaires mais si nous élevons notre niveau de pensée en cherchant l’essence du mot, l’éternité qu’il y a dans le mot, le contenant étant le contenu, quel est le contenu c’est-à-dire l’idée que la Torah veut nous transmettre ? La colère de Réouven, l’injustice et la honte que sa mère a vécues tout au long de sa vie à l’ombre de Rah’el et maintenant même après sa mort, elle subit encore un outrage ! Il laisse éclater sa colère. Cette même colère qui l’a fait passer à l’acte au point de défaire la couche de son père, la Torah nous enseigne qu’elle est capable de le faire dormir avec Bilha ! Le mot a l’éternité en lui. Lorsque nous lisons les mots de la Torah, essayons de trouver l’éternité enfouie dans chaque mot, son âme. C’est ce que nos sages ont si bien su faire et c’est ce qu’ils nous ont transmis. La Torah orale. Ainsi changeons notre approche, notre vision de la vie, comment orienter le sens de notre vie.
Comment peut-on comprendre que dans un acte de colère, il peut y avoir l’éternité? Comment arrive-t-on à cette éternité par le mot ? En ressentant l’infiniment grand qu’il y a dans son contenu. Cette colère libérée, la Torah témoigne jusqu’où elle peut aller. Cette énergie est d’origine divine mal digérée mais divine et donc infinie. Cette impression de puissance dégagée nous fait nous ressentir infiniment petit devant l’éternité et donc développe en nous cette crainte de l’infini.
Fin du cours Paracha Tolédot Rabbi Yérouham Leïbovitch
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