Parachat Noa’h Rav Moché Shapira
Parachat Noa’h Rav Shapira
Traduit et adapté par Rav Michaël Smadja
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Parachat Noa’h Rav Moché Shapira
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Nimrod a amené au monde une existence nouvelle et non compréhensible a priori ! ‘‘Il connaissait son créateur et son but était de se révolter contre lui ». Ce sont deux affirmations qui se contredisent: d’un côté, il connait D-ieu, cela veut dire qu’il perçoit l’unité divine d’une manière parfaite et de l’autre côté il peut arriver à se déconnecter de cette unité afin de se rebeller ! S’il se rebelle c’est qu’il ne connait pas D-ieu ! Et s’il connait D-ieu, comment peut-il se déconnecter pour se rebeller ? Et il a réussi à entrainer tout le monde derrière lui, la génération de la dispersion ! Un monde complètement uni avec une seule manière de communication, un seul langage, Nimrod est arrivé à le détourner de cette unité pour se rebeller contre
D-ieu ! Une pensée qui se contredit d’elle-même et qui s’est insérée dans le monde entier. Un seul être ne s’est pas associé à cette révolte, Avraham Avinou ! Sur lui, il est dit: »Avraham l’hébreu car tout le monde était d’un côté de la rive et lui de l’autre côté » il a été le seul qui s’est tenu de l’autre côté de tout le monde et s’est séparé d’eux mais ne s’est pas tenu contre eux. Personne ne s’est tenu contre cette idée de se rebeller contre D-ieu. Nos sages enseignent que cette séparation de Avraham Avinou était stérile, elle allait vers un mur, il était un homme sans futur, sans avenir !
Cette idée insensée a entouré tout le monde: »connaître D-ieu et ressentir le besoin de se rebeller ». Et alors, par cette idée, l’union qui était entre eux s’est interrompue. Ils se sont dispersés.
Nimrod a été appelé après »amraphel » c’est-à-dire »amar pol », Rashi explique ce nom ainsi: »car il a dit à Avraham Avinou «tombe dans le four» ». Ce même Nimrod qui a réussi à amener le monde à une pensée unique de »connaître D-ieu tout en pouvant se rebeller contre lui’‘, a disloqué l’union qu’il y avait entre tous les hommes !
Nous sommes toujours sous la domination de Nimrod par l’exil de Edom. Par sa descendance, ont été détruits les deux temples. Elle a détruit la royauté de David. Elle l’a prise pour elle. Et depuis la royauté n’est plus revenue à David. Et nous sommes depuis en exil ! Tout cela vient du fait que Nimrod a pris la royauté d’Avraham. C’est lui qui a combattu la royauté de D-ieu dans le monde.
La force de Nimrod était dans sa bouche, dans sa parole. La Torah l’a appelé »amraphel » »Amar pol » car il a dit à Avraham Avinou »tombe dans la fournaise de braises ». L’expression est étrange: »il a dit «tombe» » au lieu de le faire tomber directement sans lui demander ! Que vient faire cette parole ? Pourquoi a-t-il parlé ?
Nabuchodonosor a dit dans son orgueil qu’il était au même niveau que D-ieu. Alors est sortie une voix du ciel et lui a dit: »mécréant fils de mécréant fils du fils de Nimrod le mécréant qui a fait se révolter le monde entier contre la royauté divine ». Nabuchodonosor a été relié à son ancêtre Nimrod sur ce fait de s’être enorgueilli d’être l’égal de D-ieu! Nimrod étant les prémices de la royauté de Bavel qui a détruit le premier temple ! En vérité, celui qui a pris notre royauté, c’est Nimrod car la royauté de Bavel vient de sa force ! Nimrod a construit une ville et une tour. Le Zohar explique qu’il a voulu construire dans le monde une autre réalité.
Où se dévoile le nom divin sur terre ? Uniquement dans une ville et dans une tour c’est-à-dire dans la ville du roi David, la ville de Jérusalem et dans la tour de David, le temple.
Nimrod en construisant sa tour, a voulu repousser la présence divine de sur terre. Il a construit l’opposé de la volonté divine ! La ville que les gens de Nimrod ont construite est l’anti-Jérusalem et la tour est l’anti-temple. Le côté opposé qui se tient en face. Deux chemins l’un parrallèle à l’autre. Un chemin où le D-ieu se dévoile et un chemin où il cache sa présence !
Lorsque Yossef s’est dévoilé à ses frères, il est écrit: »Yossef a pleuré sur ses cous et Binyamin a pleuré sur son cou » le cou étant une allusion au temple, chacun pleurant sur la destruction des saints temples. De même que le cou relie le cerveau qui est l’au-delà au corps qui lui est le monde de la matière. Le corps est représenté par la »ville » où toutes les forces se dispersent car tout ce que fait l’homme en acte c’est par son corps. Le cou est représenté par la »tour » qui relie la »ville » à sa source, au Daat, à la connaissance qui est la source de tout acte. Le Beth Hamikdach, le saint temple s’est dévoilé dans le monde dans le rêve de l’échelle de Yaacov. Lorsqu’il s’est réveillé de son rêve, il s’est exclamé ainsi: »cet endroit ne peut être que la maison de D-ieu et la porte des cieux‘‘. Ici est l’endroit qui unit les mondes supérieurs au monde inférieur. Cette échelle qui arrivait jusqu’aux cieux et de là-haut, se déversait l’abondance dans ce monde. C’est ce qui est appelé le »cou », la tour qui relie la ville à ce qui est au-dessus d’elle.
Nimrod a construit une ville à l’intérieur d’une tour qui n’avait pas de sommet. Car en fait les cieux où arrivait la tour n’étaient en fait que la continuation de la terre. La volonté de faire tenir cette conduite matérielle en tant que réalité unique. C’est la tour qui s’est tenue à l’opposé de la tour du roi David.
Nos sages enseignent que la Tour de Bavel n’avait pour but unique que de disloquer les cieux de la terre, de couper le lien entre la spiritualité et la matière. ‘‘Les cieux étant la propriété de D-ieu et la terre, il l’a donnée à ses habitants » la terre a été donnée aux hommes puis elle a été prise par ces mêmes hommes.
Le Talmud rapporte une contradiction avec un autre verset qui dit: »à D-ieu est la terre et tous ceux qui la remplit‘. Le Talmud répond que la terre a été donnée uniquement à celui qui tend ses mains vers le créateur pour la recevoir. Mais celui qui prend la terre et dé-imbrique celle-ci du créateur, sur lui est dit »à D-ieu est la terre et ceux qui la remplit ».
La génération de la dispersion a voulu séparer d’une véritable séparation la matière et le spirituel. La terre étant aux hommes de la même manière que les cieux sont à D-ieu.
La Torah nous enseigne dans ce chapitre jusqu’où les hommes de la génération de la dispersion ont voulu arriver. La terre devenant autonome, faisant abstraction des cieux. Le corps devenant autonome faisant abstraction de l’âme divine.
Et ceci au moment où Nimrod a rassemblé tous les gens sous une ligne de pensée unique, devenant comme un seul homme. Comme s’il n’y avait qu’un seul homme. Un seul homme qui se tenait contre Avraham Avinou. Nimrod étant la tête de cet homme qui était en train de se former par la génération de la dispersion et Avraham étant la construction d’un homme complètement opposé.
Avraham Avinou a compris du plus profond de son être ce que D-ieu nous a donné c’est-à-dire la possibilité de LE faire régner sur nous, de révéler sa présence sur terre. La plus grande des bontés qu’il nous a données est que nous puissions accéder à la vérité de la création. Avraham s’est annulé pour atteindre cette vérité et devenir lui-même la bonté incarnée. Il a transmis toute la finalité du monde, son honneur, sa gloire dans nos mains. Et nous avons ce pouvoir uniquement parce que nous avons la possibilité de nous révolter. Et cette possibilité de faire le mal nous oblige à nous annuler complètement afin de faire la volonté divine et par cela, s’unir à D-ieu. D-ieu étant appelé le D-ieu d’Avraham! Avraham étant le point d’unification de la terre aux cieux, le pilier qui soutient les cieux et la terre.
Ce mécréant de Nimrod a pris cette bonté et l’a détournée pour ces propres intérêts, dans la direction inverse. D-ieu lui a donné la terre. Elle est à lui maintenant et D-ieu doit se retirer d’elle. Il a en lui un tel pouvoir qu’il peut inverser la nature, d’existante à inexistante, se désolidariser de la source de vie. Cette tour qu’ils ont construite jusqu’au ciel était pour arriver au point de limite afin que nous ne puissions remonter vers le haut et rester uniquement dans le monde de la matière sans aucune spiritualité véritable: autonomie totale de la matière.
Le Talmud enseigne qu’une émeraude était suspendue au cou d’Avraham Avinou et tout celui qui la regardait était de suite guéri. Lorsqu’Avraham Avinou est parti de ce monde, D-ieu a suspendu cette émeraude au soleil. Alors celui qui réellement a le mérite de l’observer, il est de suite guéri.
Quelle est cette émeraude et que représente-t-elle en vérité? C’est la force de la parole de Avraham de dévoiler la vérité, de faire descendre la spiritualité dans ce monde ! C’est ce qui est appelé le »cou » d’Avraham qui relie l’âme au corps. Et ainsi il est possible de faire descendre les lumières les plus élevées, les transformer en paroles et les dévoiler dans le monde. Le service de Avraham Avinou était dans cette notion qui s’appelle »et il l’appela au nom de D-ieu ». Il était celui qui appelait au nom de D-ieu, allant de ville en ville, de pays en pays et rassemblait énormément de gens. Et tous demandaient: »qui est D-ieu ? » et il expliquait à chacun qui était D-ieu. Et ainsi il a diffusé le nom de D-ieu dans le monde. Et ainsi il a étendu la croyance en un D-ieu unique dans le monde. C’est la force de celui qui a cette qualité de »cou’ ‘! Avoir le pouvoir de réunir tout à l’au-delà. Et chacun a développé en lui cette force d’union avec le divin par l’intermédiaire de son »cou ».
Toute pensée erronée a en elle le lien qui l’unit à sa source divine. Avraham a pris chacune de ces pensées et les a reliées à sa source véritable. Et ainsi, chaque homme faisait téchuva et revenait vers D-ieu, par sa propre pensée. Chaque pensée et pensée dans le monde, amène à la croyance. Si nous observions de manière parfaite d’où vient la pensée et où elle va, toujours nous arriverions à la conclusion qu’il n’y a rien d’autre que sa volonté. Avraham a réussi à atteindre ce point de jonction. Il a été appelé »le père d’une multitude de peuples ». Il a enraciné la possibilité de connaître de manière vraie la réalité de l’existence.
Lorsqu’Avraham s’est retiré de ce monde, cette émeraude a été suspendue au soleil, c’est-a-dire que le soleil est notre gouverneur. Nous sommes sous la domination du soleil. C’est-à-dire qu’il faut rechercher derrière cette domination, la véritable force qui régit le monde.
Nimrod, le petit fils de H’am, a pris les vêtements du premier homme. H’am ayant pris ces vêtements pour les placer dans l’arche et donc Nimrod les a hérités, des vêtements de lumière. Éssav a tué Nimrod pour lui voler ces vêtements et Rivka les a pris pour habiller Yaacov afin qu’il prenne les bénédictions de son père Yitshak.
A quoi fait référence les vêtements du premier homme ? Il est évident que cela ne fait pas référence à de simples habits, uniquement.
Sur Nimrod et Essav, il est dit qu’ils étaient des chasseurs redoutables car celui qui était vêtu de ces vêtements, toutes les bêtes se collaient à lui.
Le premier homme, après la faute, s’est fait un habit pour couvrir sa nudité. Il ressentait qu’il était nu et donc il en était honteux. Cette honte n’est venue qu’après la faute. Le mot »habit » en hébreu se dit »lévouch » »lo bouch » »pas de honte ». Les vêtements ont pour but d’enlever la honte ! La partie la plus basse d’un homme, celle qui génère de la honte, est recouverte par des habits. Les habits enlèvent la honte, recouvrent la bassesse et amènent l’honneur. Les vêtements en eux-mêmes révèlent la notion de mensonge, ils trompent, ils révèlent une extériorité qui n’est pas vraie. L’habit fait que l’intériorité qui est bas, devienne honorable extérieurement. L’habit s’appelle aussi »Méhil » qui veut dire »vol » et aussi »Bégued » qui veut dire »tromper », »ne pas être ce que nous laissons paraître », »disloquer la pensée de l’acte ». »Méhil » c’est s’approprier quelque chose qui n’est pas à nous. Deux hommes ont pris ces vêtements qui par ce fait avaient la puissance de chasser par leur bouche.
La racine de la notion de »vêtement » est la parole. Car le mot est l’habit par lequel la pensée se matérialise. La pensée s’habille par des mots et ainsi elle se révèle. Les mots ne sont qu’un habit à la substance. La véritable substance est à l’intérieur de l’homme. Le mot n’est qu’un habit.
Avec leur bouche, les hommes chassent, capturent les êtres. La force de capturer les créatures est la même force qui a été donnée au premier homme afin de remonter de sa bassesse et de dévoiler son honneur. Ses vêtements ne sont pas la vérité mais un moyen de revenir à la vérité. Et les hommes ont pris ce pouvoir et au contraire ont rabaissé la vérité sous la domination de la bassesse.
Le Maharal explique que Essav a pris les vêtements du premier homme et Yaacov a pris le rayonnement de la face du premier homme. La face est un des endroits particuliers du corps qui ne supporte pas d’habit. ‘‘La face de Yaacov était la même que celle du premier homme ». Le rayonnement de la face de Yaacov était de la même intensité que celui de la face de Adam avant la faute. Yaacov, l’homme de vérité a pris la face de Adam, sa forme intérieure qui ne supporte pas d’habit. Le visage ne ment pas. Le visage dévoile l’intériorité pour celui qui sait lire sur les visages.
Éssav a pris le vêtement. Cette même force d’habillage des mots, de toute la bassesse qu’il puisse exister, de tout mal qu’il y a dans le monde il est possible de l’habiller par des mots et être perçu, entendu par autrui. Les plus grands mécréants ont écrit des livres où les mots se reliaient l’un à l’autre, le mal et le mensonge se percevant par ces mots. Les plus terribles mécréants ont écrit des livres entiers. Ainsi sont perçus les vêtements. Le mot qui définit le vêtement que Adam a revêtu, se dit » kotenot oro », »oro » signifie »lumière », »אורו » lorsqu’il est écrit avec un »א » ou bien il s’écrit avec un »ע » qui veut dire »peau », »עורו » dont la racine du mot est »עיור » »aveugle ». Adam s’est revêtu d’un vêtement dont l’intérieur était lumineux recouvert d’une peau qui empêchait la lumière de se révéler, un vêtement qui illumine et qui cache. Ainsi était le vêtement du premier homme. Nimrod et Essav ont utilisé le côté »עור » »peau », »caché » du vêtement, le mensonge couvrant la vérité.
Yaacov Avinou lorsqu’il s’est habillé des vêtements du premier homme, a lui aussi dit du mensonge, a priori. Lorsqu’il s’est habillé des habits de Adam, cela a eu comme conséquence que »l’intériorité se disloque de l’extériorité ». Mais ce qu’a réussi Yaacov à faire est que la vérité vraie s’est révélée du mensonge lui-même. Ainsi, il faut utiliser les vêtements du premier homme. De l’endroit du mensonge lui-même, il y a la possibilité de dévoiler la vérité.
Amraphel »amar pol » »il a dit «tombe», pourquoi Nimrod a-t-il eu besoin de parler à Avraham pour qu’il saute dans la fournaise ? Alors qu’il l’a simplement poussé ! La notion principale dans cet événement n’est pas le fait de faire tomber Avraham dans la fournaise mais le fait que la parole de Nimrod s’est tenue contre la parole d’Avraham. La force de sa bouche avait pour but lorsqu’il a prononcé le mot »pol » de créer une balance avec deux penchants soit la balance penche d’un côté ou d’un autre côté. Il a voulu enfoncer le monde dans la dualité et éliminer la conduite unitaire de la création. On ne parle pas de son acte meurtrier qu’il a voulu exécuter. Car le principe de son nom est »Nimrod », il a fait se révolter le monde par sa bouche. Ces mêmes mots qui ont fait tomber le monde d’Avraham Avinou. Le monde de la dualité prenant le pas sur le monde de l’unité dans la création. C’est la racine de celui qui a pris la »royauté » de la descendance d’Avraham.
Ainsi nous nous tenons jusqu’à présent sous la domination des quatre royautés. Dans notre essence, nous nous trouvons sous l’influence des descendants de Nimrod. La véritable lutte est une lutte entre la perception de Nimrod, conduite de la dualité, le bien et le mal qui est à l’opposé de l’influence d’Avraham, conduite de l’unité divine dans le monde.
Nous sommes les enfants de la conduite de Avraham Avinou. Le monde entier est sous la conduite de Nimrod. Il n’y a pas de limite à cette notion d’habiller la vérité par de beaux mots. Toute impureté, toute bassesse, il est possible de l’habiller avec des mots.
Il faut faire une révolution dans notre perception de la vie. Nous sommes dans une conduite où le mot ne se perçoit que dans son extériorité, nous n’avons plus accès à l’intériorité du mot, à la pensée qu’il y a derrière le mot. Lorsque nous écoutons un discours, nous prenons les mots tels qu’ils sont et nous les transformons pour notre intérêt personnel et par cela, nous nous coupons de sa source divine. Il faut arriver à écouter l’intériorité de la personne qui nous parle et non l’extériorité qu’il exprime. Nimrod a en vérité coupé la »télépathie », le pouvoir de s’introduire directement dans le monde de la pensée, dans le monde de la formation (yétsira) pour s’introduire dans le monde de la création (Briya). Il a coupé le lien par cette façon de percevoir le mot, qui relie le monde de l’action (Assiya) au monde de la formation. Nimrod nous fait rester uniquement dans le monde de l’action sans lien avec la spiritualité.
De cette conduite, nous ne pouvons espérer quoi que ce soit. Nous devons sortir de cette perception et aller dans une conduite où les mots sortent directement de la gorge d’Avraham Avinou et de suite, nous percevrons la vérité de l’unité divine.
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