Le but ultime de la création de l’homme est qu’il se fatigue par la parole. Paracha Tazria. Réouven Carcéles
Homme fatigue par la parole
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Leilouy Nichmat zhari bat Soulika, Réouven ben Mazal et Myriam bat Saada
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Dans la Paracha de la semaine, la Torah nous dit : « Parle aux fils d’Israël en disant : Une femme lorsqu’elle concevra et enfantera un mâle, elle sera impure pendant sept jours, comme aux jours de l’isolement de son flux elle sera impure » (Lévitique Chap. 12, v. 2).
Il est intéressant de remarquer que toute notre Paracha, qui traite des lois relatives à la Tsaraat (lèpre), porte le nom de Tazria qui signifie enfanter (ou ensemencer). A ce titre, nous voyons que les huit premiers versets de notre Paracha parlent d’un sujet complètement différent à savoir celui de la femme, lorsqu’elle enfantera et donnera naissance à un garçon, sera alors impure pendant sept jours, au point que plus loin (verset 6), la Torah nous dit qu’elle devra amener un sacrifice comme holocauste et comme expiatoire pour sa purification.
Pourquoi la Torah a-t-elle choisi de mettre délibérément au début des lois de la Ttsaraat un passage qui n’a rien à voir avec le sujet ?
Justement à ce propos Rachi, sur le même verset, rapporte au nom du midrash, Rabbi Simlai, qui enseigne que de même que, lors de la création, l’homme a été formé après tous les animaux domestiques et sauvages et les oiseaux, ainsi la loi qui le concerne est énoncée après celle des animaux domestiques et sauvages et des oiseaux.
Il y a lieu de se poser la question suivante, pourquoi Rabbi Simlai veut-il établir un lien entre ces deux chronologies, d’autant plus que les lois d’impureté de l’homme dans notre Paracha font suite à celle de la semaine dernière (Chemini), qui parle des lois d’impureté des animaux ? Il est bon de rappeler aussi, l’enseignement de nos maîtres qui expliquent dans la Guémara (Arakhin 16b) que la Tsaraat vient de la médisance, c’est-à-dire que l’homme a séparé par la mauvaise langue le mari de la femme, et l’homme de son prochain, et lui aussi devra donc être séparé, hors des trois camps (Pessahim 67a). Il est important donc de comprendre le lien qu’il y a entre le sujet de la lèpre due au Lachone ara, et la gravité de cette faute (au point que le Kli Yakar nous dit qu’il devra laisser pousser les cheveux de sa tête, ses vêtements seront déchirés, il se couvrira le dessus de la lèvre pour expier le pêché commis par la langue, il sera déclaré impur ! impur ! tous les jours où l’infection est en lui), la femme qui enfante et qui sera punie pour cela, et enfin le Midrach cité par Rachi ?
Il est possible d’y répondre d’après l’enseignement de la Guemara dans Sanhédrine (99b), qui dit que l’homme a été créé pour se fatiguer ; nos sages sur place demandent : de quelle fatigue s’agit-il ? Réponse : la fatigue dans la parole. Il existe dans le monde quatre niveaux de création qui regroupent tous les êtres et éléments de ce monde. Le premier niveau désigne le minéral, créations qui n’ont pas vraiment de vie, le second désigne les végétaux, le troisième c’est le vivant qui correspond à tous les animaux et le dernier c’est l’homme (celui qui parle). Ainsi Hachem a distingué l’homme de toutes les autres créatures et l’a élevé par rapport à elles, à cause de cette qualité qu’est la parole, c’est-à-dire que le but ultime de la création de l’homme est qu’il se fatigue par la parole.
Mais de quelle parole s’agit-il ? Les sages expliquent : « dans l’étude de la Torah », ainsi la mida (qualité) qui va lui permettre de s’appeler « un homme méritant », élevé au-dessus de toutes les créatures, est justement la mida de Chemirate Halachone (contrôle de la langue), comme le dit le H’afets Haim, qui rappelle que la qualité de savoir garder sa langue des propos interdits est indispensable pour mériter l’appellation même d’homme.
C’est peut-être cela que rapportent les sages dans le midrash, que si l’homme est méritant, on lui dit qu’il a précédé tout ce qui a été créé. Sinon, on lui dit qu’un moustique l’a précédé. Comment comprendre ce midrash ? Nous savons maintenant que l’homme a, en effet, été créé après toutes les créatures de ce monde ci, en l’occurrence, le sixième jour de la création. Que signifie donc que si l’homme est méritant il a devancé toute la création ? Le Ktav Sofer nous dit que l’homme est considéré comme la couronne de la création. Il est considéré comme supérieur à toutes les créatures même au-dessus des anges car il a un but et une mission, celle de servir D. et d’étudier sa Torah. Ceci n’est vrai que lorsqu’il est « méritant », lorsqu’il remplit sa mission sur terre. C’est ce qu’explique La michna de Pirké Avot (Maxime des pères), quiconque honore la Torah, son corps est honoré au-dessus des créatures. Quiconque déshonore la Torah, son corps est déshonoré par les créatures. Cela rejoint peut-être ce que développe Le Messilat Yecharim, si l’homme ne s’élève pas spirituellement mais choisit le chemin de la matière, des pulsions, et s’attache à l’aspect animal de sa personne, il est alors pire que les behemot (bêtes) qui, elles n’ont pas la faculté de s’élever et vivent selon leurs instincts, car c’est là leur unique tendance.
C’est un grand fondement pour tout un chacun, parce que c’est spécialement dans notre Paracha qui traite de la plaie de tsaraat qui survient à cause du Lachone Hara (médisance), que la Torah a donc fait précéder les lois des animaux. Ceci pour nous apprendre, comme nous l’avons expliqué, que toute la spécificité et supériorité de l’homme par rapport aux animaux réside dans la force de la parole. S’il n’arrive pas à s’élever dans ce domaine, c’est-à-dire de se servir de cet outil uniquement pour des paroles saintes et étudier la Torah, alors l’homme est en dessous de tout ! C’est pour cela que la Torah, qui a mis l’accent sur le fait que l’homme peut être bien au-dessus des animaux ou alors inférieur à eux, fait place à toutes les lois de la tsaraat, pour montrer que c’est dans le domaine du contrôle du langage que l’homme pourra s’accomplir.
Maintenant que nous sommes arrivés jusque-là, nous pouvons essayer de comprendre pourquoi la femme qui enfante, doit être punie au point d’amener un sacrifice expiatoire et un holocauste ? Le Keli Yakar nous dit au nom des sages (Talmud Nidda 31b), qu’une accouchée doit offrir un holocauste car au moment où elle souffrait au cours de l’enfantement, elle a juré qu’elle ne retournerait plus à son mari. Ensuite elle regrette son serment parce que l’enfant la réjouit et lui fait oublier ses douleurs, mais simplement elle doit quand même offrir cet holocauste. Mais la question qu’on peut se poser est pourquoi doit-elle aussi amener un sacrifice expiatoire ? Le Chem Michemouel nous explique que l’accouchée doit offrir un holocauste, qui fait expiation sur la pensée, mais aussi un expiatoire, qui fait expiation sur l’acte, car elle a émis par sa bouche ce serment, elle s’est insurgée en son cœur et donc elle s’est rebellée contre Hachem, c’est comme si elle avait dit de sa propre bouche.
Nous voyons donc encore une fois, la force de la parole et la gravité de ce que cela peut entrainer. Le Midrach Rabba nous dit : il y a un homme qui faute sur terre et qui ne faute pas dans le ciel, il y a un homme qui faute dans le ciel et qui ne faute pas sur terre, et il y a le Lachone Hara qui fait fauter sur terre et dans le ciel. Il faut savoir que le Lachone Hara a comme particularité d’être non seulement une faute terrestre mais aussi céleste, dont les implications montent très haut. C’est pour cela, qu’une des réparations pour le Lachone Hara que nous décrit la Torah, est l’encens faite par le Cohen Gadol dans le saint des saints, c’est-à-dire l’endroit terrestre le plus élevé du Beth Hamikdache (Temple de Jérusalem) et du monde, pour montrer que les effets du Lachone Hara dans le ciel étaient à l’endroit le plus élevé.
Shabbat shalom
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Fin de l’article « Le but ultime de la création de l’homme est qu’il se fatigue par la parole. Paracha Tazria. Réouven Carcéles » mis en ligne 1er Avril 2019 et mis à jour le 23 avril 2020.
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