Parashat Yitro
La Torah selon le Malbim: Les dix paroles (2)
Traduit et adapté par Rav Michael Smadja
Pour télécharger le fichier correspondant :
Pour étudier la première partie : Les dix paroles 1
Exode, chapitre 20 – verset 4
« Tu ne te prosterneras pas à eux et tu ne les serviras pas car je suis Hachem ton D-ieu, D-ieu jaloux qui se souvient de la faute des pères sur les enfants sur la troisième et quatrième génération pour ceux qui me haïssent ».
Selon l’avis du Rambam, l’interdiction de se prosterner »tu ne te prosterneras pas’‘ s’applique même sur l’idole dont son service n’est pas la prosternation de même que tous les services que l’on fait à l’intérieur du temple tel que les encens, le sacrifice et la libation de vin et l’interdiction « tu ne les serviras pas » est un avertissement à tout service réservé à l’idole spécifiquement même si le service est dégoûtant tel que « faire ses besoins devant l’idole du nom de « poer » ou bien jeter des pierres sur l’idole qui s’appelle « Markoulis » ».
Le Ramban s’interroge sur l’explication du Rambam: « cela veut dire que dans les deux premières paroles sont incluses cinq Mitsvot: 1- la croyance en un D-ieu unique 2- il n’y a pas d’autre énergie divine 3- interdiction de sculpter des divinités 4- ne pas se prosterner devant elles 5- ne pas les servir. Comment alors Rabbi Samlaï a pu interpréter le verset: « la Torah que Moshé nous a ordonnée » la valeur numérique du mot « Torah » étant 611 voulant dire que 611 Mitsvot ont été dictées au peuple par Moshé et deux par D-ieu lui-même. Les deux premières paroles qui sont « je suis Hachem ton D-ieu » et « tu ne te prosterneras pas ». Voici que d’après le Rambam cinq Mitsvot ont été dites par D-ieu lui-même car du troisième verset au cinquième verset, cela est considéré comme une seule parole contenant cinq Mitsvot.
En fait les trois interdits que sont »tu ne les serviras pas » « tu ne te prosterneras pas » »tu ne feras pas de sculpture » font déjà parties des sept mitsvot noahide, qui ont été redites à Mara et seules, les paroles « anokhi » et « il n’y aura pas » ont été dévoilées au Mont Sinaï et non aux enfants de Noah qui ne sont pas ordonnés sur ces deux commandements (association d’une force étrangère avec le divin) et uniquement ces deux paroles ont été dites par D-ieu.
« Car je suis ton D-ieu, D-ieu vengeur » j’ai déjà expliqué la différence entre « ani » et « anokhi » l’expression « anokhi » venant exclure toute autre personne car les égyptiens pensaient qu’il y avait une énergie bénéfique et une énergie maléfique séparées. L’énergie bénéfique étant représentée par « D-ieu de miséricorde » et l’énergie maléfique étant représentée par « D-ieu vengeur ». Pour cela, le verset emploie le mot « anokhi » »je suis celui qui t’a sorti d’Égypte » je suis le même D-ieu vengeur qui punit, celui qui fait le mal. Et sur cela, le Midrash explique le verset « Je suis je suis D-ieu qui vous console » ainsi: par les deux fois où j’ai prononcé le mot « anokhi » au Sinaï « je suis (anokhi) Hachem ton D-ieu qui vous ai sorti de la terre d’Egypte » et « je suis (anokhi) un D-ieu vengeur », je vous console. C’est-à-dire que de ces deux paroles tu comprends que celui qui punit et qui dispense le bien n’est qu’un. Le mal est lui-même le bien. La punition, les exils et les souffrances qui vont venir sur vous n’ont pour but que le bien extrême et cela est votre consolation comme il est dit: « car je connais les pensées que je pense pour vous ». Et ainsi la Mékhilta explique: « je suis un D-ieu vengeur » ainsi: »je suis celui qui domine la vengeance et non la vengeance qui me domine ». Je suis celui qui se venge des idolâtres mais je suis clément et miséricordieux pour d’autres sujets. Car j’ai déjà expliqué à propos du verset « jaloux et vengeur est D-ieu, il se venge et est coléreux״ qu’il y a une différence entre « jaloux » et « vengeur« . Il est « jaloux » à cause de la profanation de son honneur et il est « vengeur » à cause du « mal » qui lui est fait concrètement. D-ieu se venge de la faute de l’idolâtrie comme un homme qui se venge de sa femme qui l’a trompé car il venge son honneur qui a été bafoué et il n’est pas apte d’employer pour cette faute le terme de « vengeance » car l’idolâtre ne fait pas de mal effectif. Le terme »vengeance » pour exprimer la vengeance sera employé pour des fautes telles que le vol ou le meurtre. De même que les fauteurs par le biais de l’idolâtrie seront appelés aux yeux de D-ieu « ennemis » ou bien « haineux » mais les autres fauteurs seront dénommés « oppresseurs » car il y a une différence entre « oppresseur » et « ennemi ». L’oppresseur agit réellement, met une pression physique sur lui-même pour fauter bien qu’il ne soit pas dans la haine vis-à-vis de D-ieu. Le désir étant l’élément moteur et principal de sa faute alors que l’ennemi à quelque fois n’agit pas par désir et contrainte mais par haine du créateur et par l’idolâtrie, il veut affaiblir sa présence dans sa création.
Et il y a deux différences entre ces deux sortes de personnes:
1/ le « vengeur » celui qui a été offensé en développant un ressenti de jalousie par l’idolâtrie, ne va pas se dépêcher pour se faire justice car il peut retenir sa colère en lui mais « le jaloux » celui qui a été offensé en acte par le vol ou le meurtre se fera justice de suite afin d’endiguer l’acte physique pour ne pas qu’il se propage dans la matière comme il est dit dans le verset: « D-ieu jaloux et vengeur Hachem, vengeur et coléreux Hachem se venge de ses oppresseurs et garde rancune à ses ennemis ». A propos du terme « se venge » il est précisé « vengeur Hachem » c’est-à-dire il se venge de suite alors que pour le terme « jaloux » il est dit l’expression » coléreux » et « garder rancœur » ainsi pour « il se venge » il est fait référence à ses » ses oppresseurs » d’une manière physique alors que pour la dénomination « jaloux » il est fait référence à son ennemi, de manière ressenti plus pernicieux et moins concret.
2/ le « vengeur » au moment d’exprimer sa vengeance ne va pas faire apparaître sa clémence car à ce moment il explose de s’être retenu tout ce temps et d’avoir contenu son courroux. Ce qui n’est pas le cas du « jaloux » qui ne punit pas parce qu’il est jaloux et ainsi pourra faire apparaître de la clémence après avoir puni. Pour cela dans notre verset à propos de l’interdiction de l’idolâtrie il est précisé: » car je suis ….un D-ieu jaloux…pour ses haineux » car par rapport aux idolâtres qui sont dénommés « mes haineux », D-ieu va se conduire avec cette »qualité de jalousie ». La Mékhilta expliquant le côté positif de cette qualité: la retenue. Et le côté négatif: au moment où sa colère et sa vengeance se déversent, aucune clémence n’apparaîtra. Et ceci ne se fait que pour la faute de l’idolâtrie car le terme « vengeance » ne se trouve que pour cette faute de l’idolâtrie.
« il retient la faute des pères sur les fils«
Nos sages s’interrogent: voici qu’il est écrit dans un autre endroit: « les pères ne mourront pas à cause des enfants« ! Donc les fautes ne sont pas transmissibles et ne lèguent pas ! Le Talmud répond que notre verset parle du cas où les enfants font perdurer la faute des parents comme il est précisé: « la faute des pères sur les fils » c’est- à-dire les fils répétant la faute de leurs pères. Alors à ce moment, les enfants seront punis non seulement pour la faute en elle-même mais aussi en tant qu’héritage de leurs pères. Et le verset précise que ce n’est qu’à la quatrième génération que la faute sera sanctionnée, c’est-à-dire lorsque cette faute d’idolâtrie aura traversé et perduré quatre générations.
Il y a une différence entre « רביעים » et « רבעים » car « רביעים » fait référence au chiffre quatre, la quatrième génération alors que le mot « רבעים » fait référence aux quatre générations en même temps. Et donc notre verset explique ici que seulement si les quatre générations font l’idolâtrie alors D-ieu se fera payer la faute des pères sur les fils. Pour cela la Mékhilta explique que Moshé lorsqu’il a entendu ce verset, s’est prosterné afin de remercier car il savait qu’il ne pouvait y avoir dans l’assemblée d’Israël de mécréant fils de mécréant qui lui-même est fils de mécréant. Il faut aussi préciser que ce verset parle de la faute d’idolâtrie uniquement et volontaire comme il est précisé « Avone » alors que dans le verset: » par sa faute, il mourra » parle de « h’ete » de faute involontaire. Et donc nous pouvons comprendre ces deux versets ainsi: lorsque la faute est volontaire elle retombe sur les enfants mais quand la faute est involontaire elle ne peut retomber sur les enfants.
« Et qui dispense la générosité aux deux mille générations à venir de mes aimés et de ceux qui gardent mes préceptes »
Nos sages enseignent que celui qui agit avec amour est plus grand que celui qui agit avec crainte car celui qui agit avec crainte, sa récompense va jusqu’à mille générations et celui qui agit avec amour, sa récompense va jusqu’à deux mille générations. Ici il est écrit: « aux deux mille de mes aimés et des gardiens de mes commandements » et dans un autre verset il est écrit: « à mes aimés et aux gardiens de mes commandements pour les mille générations ». Du fait qu’il est apposé ici le mot « les deux mille » au mot « mes aimés » cela fait référence à ceux qui agisse par amour alors que dans l’autre verset il est apposé le mot « aux mille » au mot « à ceux qui gardent ses commandements » c’est-à-dire par crainte. Et bien qu’il y a écrit aussi le mot « à ses aimés » cela fait référence aux pères qui eux accomplissaient les commandements par amour mais que les générations présentent ne font plus que par crainte, à ceux-là, le salaire n’est que jusqu’à mille générations alors que ici le mot « mes aimés » est collé au mot « aux deux mille » pour dire que même les générations présentes accomplissent les Mitsvot par amour.