Je suis le premier – Je suis le dernier
Rabbi Yérouham dans Daat Torah
Traduit et adapté par Rav Michael Smadja
Il y a un principe dans la confiance divine que tout juif doit croire et connaître et qui est le principe des principes : « D-ieu est ‘un’ et son nom est ‘un’« . Le verset dit : « Je suis le premier et Je suis le dernier ». De la même manière qu’au départ dans ce niveau de perception d’avant la séparation de Adam et de H’ava [Eve], il est réellement « un », une situation d’avant la faute primordiale. « L’unitude » de D-ieu était dans un état de dévoilement extrême où Il « se promenait avec l’homme dans le jardin d’Eden », dans cet état de perception divine où il est certain que rien ne peut être perçu si ce n’est Sa lumière divine. Ainsi nous devons croire et savoir par une perception totale que « Je suis le dernier ». Dans la situation la plus éloignée, la plus obscure, là où aucune lumière divine ne peut se percevoir, dans les temps les plus obscurs que sont « les talons du Mashiah », comment peut-on percevoir l’unité divine ? Et pourtant notre obligation est de croire et de percevoir l’unité divine dans ces temps aussi reculés et obscurs ! « Je suis le dernier » même là-bas, Je suis celui qui est. Ceci est une des merveilles divines que de savoir comment « emballer » les choses, avec l’emballage adéquat pour aller jusque dans l’obscurité des obscurités. Le principe de la forme. Car il y aura le même dévoilement à la fin des temps, dans les talons du Mashiah’ comme il y a au début des temps avant la séparation de Adam et de H’ava.
La fabrication des médicaments est le parfait exemple du principe de « l’emballage ». Le principe même du médicament est liquide et il est travaillé pour prendre une autre forme, devenir un solide. Une matière douce devenant amère. A priori, ce médicament est une matière complètement différente de ce qu’il était au départ ! Il y a eu transformation jusqu’à annulation totale de sa constitution de base ! Mais en vérité, que ce soit dans sa constitution moléculaire de départ ou dans sa constitution moléculaire finale, cela est la même matière. Et pas seulement, une matière différente ayant les mêmes effets, le même but mais réellement la même constitution moléculaire et donc la même réalité ! Et uniquement l’emballage, la forme a changé ! Voici la sagesse qui est enfouie dans la forme ! Ainsi, il faut comprendre le principe « Je suis le premier et Je suis le dernier ». Car la même réalité qui se trouve au moment de la création, explosion de lumière divine, se trouve dans cette obscurité. Il est possible de voir tout le principe de l’unité qui est enfoui dans l’obscurité totale aussi clairement que la lumière dévoilée au moment de la création.
« La sagesse, la h’okhma, d’où vient-elle? Et où se trouve la source de la compréhension, la Bina ? La crainte de D-ieu est la sagesse, la H’okhma et la répression du mal est la compréhension, la Bina. Ainsi est le grand principe de la forme ! Dans cette sécheresse absolue qu’est la « restriction du mal » se forme tout le principe de la Bina, de la compréhension divine ! La Bina étant le plus haut niveau et le but ultime de la perception et du rapprochement divin ! Le principe étant que dans l’éloignement le plus total, là-bas se trouve la forme, le moyen de pouvoir percevoir tout le principe de la Bina ! La restriction du mal est la forme qui révèle la Bina, la compréhension extra-sensorielle de l’unité divine.
« La bonté et le jugement je chanterai » c’est la louange du roi David devant son créateur. « Si c’est la bonté divine qui se révèle à moi, alors je la chanterai et si c’est la justice divine qui se révèle à moi, je la chanterai également ». C’est l’enseignement que tire le Talmud de cette louange du roi David. Voici que la bonté et le jugement sont deux situations opposées et donc complètement différentes a priori dans leur essence, deux réalités différentes ! En vérité, il n’y a pas devant lui deux réalités différentes mais une seule et même vérité : « que cela soit la bonté qui se révèle à moi ou bien la justice, je chanterai la gloire divine« . Ceci est le principe même de la forme dans ce monde, seule la manière de se révéler change.
Ainsi est le principe enfoui dans « Je suis le premier et Je suis le dernier ». Tout ce que contient comme révélation divine le départ de la création est obligé d’être contenu dans sa fin. De même que sa révélation est totale au début, ainsi dans la plus grande obscurité Sa révélation est totale et il est de notre obligation de percevoir Sa lumière. Et en vérité, ce n’est que dans cette obscurité totale que nous devons (pouvons) croire et percevoir son unité. Comme la lumière des étoiles ne peut se percevoir que dans l’obscurité de la nuit où le soleil ne brille pas.
Avraham a reçu tout ce qu’il a reçu comme révélation uniquement grâce à l’obscurité qu’il a traversée toute sa vie, uniquement par le mérite d’avoir eu une confiance inébranlable en D-ieu. Car en fait le but de la perfection ne se trouve que dans ce qui ne se voit pas, là où rien ne peut se percevoir par la logique de ce monde faite de causes et d’effets. C’est le principe de l’impassibilité, être aussi dur que l’acier. Et cette force ne peut se forger qu’au travers de l’obscurité de la matière. Cette obscurité que dégage la matière nous fait ressentir que celle-ci est immuable, éternelle mais en vérité, elle n’est qu’instabilité dans son état originel. Elle ne demande qu’à être transformée, énergie pure qui tire sa puissance dans la divinité. Un mur n’est mur que parce que je l’ai accepté comme étant un mur inébranlable et infranchissable mais si je vois réellement ce qu’il est, c’est-à-dire volonté divine du moment présent qui ne perdure pas car à chaque moment, la volonté de D-ieu se renouvelle, alors son éternité disparaît à mes yeux et je perçois à ce moment l’énergie divine qui se propage dans la matière. Ceci ne peut se percevoir que si je fais abstraction de la partie cognitive de mon cerveau, dans les moments où ma logique n’a plus de prise sur ma perception sensorielle, alors se révèle une perception beaucoup plus réelle qui naît d’une confiance accrue en D-ieu et où mon esprit lâche prise.
Le but de notre travail dans ce monde n’est pas d’acquérir des perceptions divines mais de pouvoir ressentir que nous ne sommes que des ustensiles dans les mains de D-ieu et nous détacher de cet impression que nous sommes les déclencheurs de tous les événements qui se dressent devant nous. Ce monde est propice à révéler cette conduite divine qui ne se révèle qu’au travers de la confiance que nous diffusons en nous afin d’avancer dans cette obscurité lumineuse. Car qu’est-ce qui fait que la matière est obscure et impénétrable ? Si ce n’est la manière dont je la perçois ! Si je la perçois par ma partie cognitive, bien que je vais en comprendre le fonctionnement, je ne vais jamais percevoir son essence, sa partie divine qui n’est que la volonté divine tapie sous cet amas de matière qui diffuse son énergie dans tous les sens. C’est cela le principe de l’exil, un exil spirituel où la matière énergétique est dans un désordre absolu. Mais c’est dans ce désordre absolu que nous avons l’obligation de faire « jaillir » tout le principe du monde futur. Car le principe de l’exil est le principe de la confiance divine. Par le mérite de la confiance, les enfants d’Israël ont eu le mérite de recevoir sur eux la révélation de la présence divine. Ce n’est que par cette confiance que l’on diffuse en nous, que nous pourrons réellement voir D-ieu et le louer. Et ce n’est que dans ce monde fait d’obscurité que cette confiance se construit. Car ce n’est pas grâce à sa sagesse uniquement qu’un homme pourra rentrer dans une fournaise ardente mais grâce à une confiance indicible qu’il s’est forgée au fil des épreuves de la vie.
La confiance ne commence que lorsqu’est abandonnée la perception cognitive. La véritable sagesse ne se trouve que dans la confiance divine. Dans l’abandon de l’ego au profit de l’instinct.
Pour guérir, il suffit de répondre « amen » d’avoir la véritable confiance que seul D-ieu guérit. Il est enseigné : « celui qui répond « amen » de toute sa puissance, les portes du jardin d’Eden lui sont ouvertes » car le principe de la confiance divine est le principe de la puissance. La confiance, l’abandon de soi procure une énergie tellement forte qu’elle ouvre les portes du paradis et du monde futur. La puissance ne vient pas de l’intelligence mais de la confiance. Et si la personne est déstabilisée devant un événement, c’est le signe qu’il lui manque la force issue de la confiance divine. C’est ce que veulent nous enseigner nos maîtres en disant que « celui qui change sa parole, qui revient sur sa parole, est considéré comme étant un idolâtre » car, étant manquant dans sa confiance divine, de ce fait, il se permet de changer sa parole car à ce moment, il n’est plus dans le même état que celui dans lequel il était au moment où il a émis cette parole et cela est déjà considéré comme de l’idolâtrie.
Incroyable !