Quarante cinquième passage – Ce Maror
On a l’usage de lever le Maror et de le montrer aux convives
מָרוֹר זֶה שֶׁאֲנַחְנוּ אוֹכְלִים עַל שׁוּם מָה. עַל שׁוּם שֶׁמֵּרְרוּ הַמִּצְרִיִּים אֶת חַיֵּי אֲבוֹתֵינוּ בְּמִצְרַיִם. שֶׁנֶּאֱמַר. וַיְמָרְרוּ אֶת חַיֵּיהֶם בַּעֲבֹדָה קָשָׁה. בְּחֹמֶר וּבִלְבֵנִים וּבְכָל-עֲבֹדָה בַּשָּׂדֶה. אֶת כָּל-עֲבֹדָתָם אֲשֶׁר עָבְדוּ בָּהֶם בְּפָרֶךְ:
Ce Maror (ces herbes amères) que nous mangeons, quelle en est la raison ? C’est parce que les Egyptiens ont rendu amères les vies de nos ancêtres en Egypte, comme il est dit (Exode, Ch. 1 v14)
וַיְמָרְרוּ אֶת-חַיֵּיהֶם בַּעֲבֹדָה קָשָׁה בְּחֹמֶר וּבִלְבֵנִים וּבְכָל- עֲבֹדָה בַּשָּׂדֶה–אֵת כָּל-עֲבֹדָתָם אֲשֶׁר-עָבְדוּ בָהֶם, בְּפָרֶךְ.
Ils leur rendirent la vie amère par des travaux pénibles sur l’argile et la brique, par des corvées rurales, outre les autres labeurs qu’ils leur imposèrent tyranniquement.
1) Explication littérale tirée de la Haggadah Ish Matsliah (page 177)
Ce Maror (ces herbes amères) que nous mangeons, quelle en est la raison ? C’est parce que les Egyptiens ont rendu amères les vies de nos ancêtres en Egypte etc….et par cela la grandeur du miracle est connue car bien que nous ayons été dans un niveau tellement bas malgré tout שֶׁבְּשִׁפְלֵנוּ זָכַר לָנוּ: כִּי לְעוֹלָם חַסְדּוֹ (Téhilim Ch. 136, v23) « à Celui, qui, dans notre abaissement, se souvint de nous, car sa grâce est éternelle ».
2) Haggadah ‘Hazon Ôvadia p86
Ce Maror (ces herbes amères) que nous mangeons, le Rambam (Ch. 8 des lois sur le Hamets et la Matsa) fait précéder le passage sur le Maror au passage sur la Matsa[1]. Le Kessef Mishné explique au nom de Rabbénou Manoa’h que la raison en est qu’au départ ils ont rendu d’abord amères leur vie (ce qui symbolisé par le Maror) et ensuite ils ont été délivrés (ce qui est symbolisé par la Matsa).
Il y a lieu d’éclaircir cela car on mange d’abord la Matsa et ensuite seulement le Maror, car le fait de manger de la Matsa est une Mitsva de la Torah en soi qui est valable également de nos jours, par contre le Maror, par la Torah, dépend de la présence du sacrifice Pascal[2]. Nous avons l’habitude de faire précéder le passage de la Matsa au passage sur le Maror de la même manière qu’on fait précéder la consommation de Matsa à la consommation du Maror (donc contrairement à l’avis du Rambam).
Les A’haronim[3] expliquent que c’est seulement après la libération, qu’ils ont pu ressentir (se rendre compte de) l’amertume et l’esclavage (subis antérieurement). Comme on voit dans le Zohar Haqadosh « un individu, lorsqu’il abandonne son asservissement alors (seulement) il sait et il ressent la brisure de ses os et la brisure de son âme ».
Il est possible également de dire que la délivrance d’Egypte n’était pas la délivrance finale comme on le voit (Nombres Ch. 3, v14) אֶ־הְ־יֶ־ה אֲשֶׁר אֶ־הְ־יֶ־ה; [4]« je suis l’Etre invariable » [littéralement « je serai qui serai »] c’est-à-dire je serai avec vous lors des assujettissements aux nations (dans tous les exils, dans toutes les difficultés) et c’est cela qui est rappelé par la consommation du Maror après la Matsa, c’est à dire qu’après la libération il y a d’autres exils d’autres périodes amères. Cependant, tout à la fin de la soirée Pascale on consomme la Matsa de l’Afikomen, pour dire que la dernière délivrance sera définitive et il n’y aura plus après elle ni exil ni assujettissement aux nations et c’est pour cela qu’on ne consomme plus rien après la Matsa de l’Afikomen.
3) Haggadah Pirsoumé Nissa page 306
Les sages disent que la Matsa est (une Mitsva) de la Torah et le Maror est (une Mitsva) d’ordre rabbinique (voir Kissé David page 125 et ‘Haim Lerosh page 63 ce qu’ils commentent sur le mode allusif à ce sujet). Pour ma part, il me semble pouvoir expliquer que la Matsa fait allusion à l’humilité, et grâce à la vertu d’humilité un individu a le mérite d’avoir la Torah et que son étude de la Torah soit pérenne.
L’Eternel n’a choisi les enfants d’Israël que parce qu’ils étaient humbles et Il a transmis la Torah au mont Sinaï qui est la plus humble des montagnes (la plus petite). C’est l’explication de ce que disent les sages « la Matsa est de la Torah »[5] c’est à dire que grâce à l’humilité, qui est la Matsa, on a le mérite d’avoir la Loi tranchée en sa faveur ; on sait (par exemple) que la loi est tranchée comme Beth Hillel (la maison d’études de Hillel) car ces sages étaient humbles ![6]
On dit également « le Maror est d’ordre rabbinique », cela donne une allusion aux barrières qu’ont instaurées les rabbins afin de ne pas en arriver à transgresser des lois de la Torah ; c’est pour cela que ces lois d’ordre rabbiniques sont comparées au Maror, car ces lois sont amères aux yeux des hommes, puisqu’elles sont permises par la Torah et ce sont les Rabbins qui ont édicté des barrières afin de ne pas en arriver à transgresser une loi de la Torah représentée par la Matsa.
[1] Contrairement à notre usage
[2] Le Maror de nos jours est donc une Mitsvah dérabbanan, un décret d’ordre rabbinique (tant que le Temple de Jérusalem n’a pas été reconstruit). On fait passer une Mitsva de la Torah avant une Mitsva d’ordre Rabbinique.
[3] Décisionnaires à partir, grosso modo, du 16ième siècle de l’ère vulgaire.
[4] Prononcer éqiéh asher équiéh
[5] Une sorte de jeu de mots : La Matsa (= l’humilité) donne la Torah
[6] Ils faisaient d’ailleurs toujours passer les paroles de leurs protagonistes (Beth Shamaï) en premier.