Onzième passage – A l’origine, nos ancêtres étaient des idolâtres
מִתְּחִלָּה עוֹבְדֵי עֲבוֹדָה זָרָה הָיוּ אֲבוֹתֵינוּ, וְעַכְשָׁו קֵרְבָנוּ הַמָּקוֹם לַעֲבוֹדָתוֹ, שֶׁנֶּאֱמַר: וַיֹּאמֶר יְהוֹשֻׁעַ אֶל כָּל-הָעָם, כֹּה אָמַר ה׳ אֱלֹקֵי יִשְׂרָאֵל בְּעֵבֶר הַנָּהָר יָשְׁבוּ אֲבוֹתֵיכֶם מֵעוֹלָם, תֶּרַח אֲבִי אַבְרָהָם וַאֲבִי נָחוֹר, וַיַּעַבְדוּ אֱלֹקִים אֲחֵרִים:
וָאֶקַּח אֶת אֲבִיכֶם אֶת אַבְרָהָם מֵעֵבֶר הַנָּהָר, וָאוֹלֵךָ אוֹתוֹ בְּכָל-אֶרֶץ כְּנָעַן, וָאַרְבֶּה אֶת זַרְעו,ֹ וָאֶתֵּן-לוֹ אֶת יִצְחָק. וָאֶתֵּן לְיִצְחָק אֶת יַעֲקֹב וְאֶת עֵשָׂו. וָאֶתֵּן לְעֵשָׂו אֶת הַר שֵׂעֵיר לָרֶשֶׁת אוֹתו,ֹ וְיַעֲקֹב וּבָנָיו יָרְדוּ מִצְרָֽיִם:
A l’origine, nos ancêtres étaient des idolâtres, mais maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service, comme il est dit [Josué Ch. 24 v. 2-4] :
[v2] Josué dit à tout le peuple: « Ainsi a parlé l’Eternel, D.ieu d’Israël : « Vos ancêtres habitaient jadis au-delà du Fleuve (l’Euphrate), jusqu’à Téra’h, père d’Avraham et de Na’hor, et ils servaient des dieux étrangers. »
[v3] Je pris votre père Avraham des bords du fleuve, et le conduisis à travers toute la terre de Canaan, Je multipliai sa descendance, Je lui donnai Isaac. [v4] A Isaac, Je donnai Jacob et Esaü, Je donnai à Esaü la montagne de Séir en héritage ; et Jacob et ses enfants descendirent en Egypte.
1) Haggada ‘Hazon Ôvadia pages 41-42 :
A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres, mais maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service. On enseigne dans le Talmoud (Péssa’him 116a) qu’on doit débuter le récit de la sortie d’Egypte par « la honte/le déshonneur » et terminer par « le compliment ». Le Talmoud interroge : « c’est quoi la honte/le déshonneur ? » Rav répond : « A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres» et Shémouel répond : « Nous fûmes esclaves de Pharaon en Egypte» [troisième passage]. En pratique, nous faisons comme les deux (et disons les deux aspects). Il est possible de dire que nous avons besoin de raconter le « déshonneur » de nos ancêtres afin de ne pas douter des comportements de l’Eternel [arriver à les critiquer, à émettre des doutes sur Ses comportements] qui a décrété sur nos ancêtres un asservissement aussi pénible. C’est pour cela qu’on répond [on donne une cause racine] « ils étaient des idolâtres ». De la même manière que nos Sages l’enseignent à propos du verset (Exode Ch. 12, v. 21) :
וַיִּקְרָא מֹשֶׁה לְכָל-זִקְנֵי יִשְׂרָאֵל, וַיֹּאמֶר אֲלֵהֶם: מִשְׁכוּ, וּקְחוּ לָכֶם צֹאן לְמִשְׁפְּחֹתֵיכֶם–וְשַׁחֲטוּ הַפָּסַח.
Moïse convoqua tous les anciens d’Israël et leur dit: « Tirez à part et prenez pour vous du menu bétail pour vos familles et égorgez le Pessa’h » [le sacrifice Pascal].
מִשְׁכוּ « tirez » signifie « Retirez vos mains de l’idolâtrie».
On enseigne également le même principe que nos ancêtres [en Egypte] étaient des idolâtres à partir du verset (Deutéronome Ch. 4 v. 4) :
אוֹ הֲנִסָּה אֱלֹקִים, לָבוֹא לָקַחַת לוֹ גוֹי מִקֶּרֶב גּוֹי, בְּמַסֹּת בְּאֹתֹת וּבְמוֹפְתִים וּבְמִלְחָמָה וּבְיָד חֲזָקָה וּבִזְרוֹעַ נְטוּיָה, וּבְמוֹרָאִים גְּדֹלִים: כְּכֹל אֲשֶׁר-עָשָׂה לָכֶם ה׳ אֱלֹקֵיכֶם, בְּמִצְרַיִם לְעֵינֶיךָ.
Et quelle divinité entreprit jamais d’aller se chercher un peuple au milieu d’un autre peuple, à force d’épreuves, de signes et de miracles, en combattant d’une main puissante et d’un bras étendu, en imposant la terreur, toutes choses que l’Éternel, votre D.ieu, a faites pour vous, en Egypte, à vos yeux?
Les Sages enseignent que la différence entre Hébreux et Egyptiens était très ténue, les uns [les Egyptiens] étaient des idolâtres, les autres l’étaient également. Les actes de Térah [père d’Avram] et Na’hor [frère d’Avram] donnaient un terreau favorable à leurs descendants pour être idolâtres ; de ces actes nous tirons un enseignement sur la détérioration [Avraham n’était plus idolâtre et ses descendants le furent] et non sur la réparation [Avraham n’était plus idolâtre alors que ses pères l’étaient] comme se termine le verset de Josué rapporté dans notre passage par Téra’h, père d’Avraham et de Na’hor, et ils servaient des dieux étrangers.
Cet enseignement qui demande de commencer par « le déshonneur » et de terminer par « un compliment » se trouve en allusion dans le verset qui nous demande d’enseigner la sortie d’Egypte à nos enfants (Exode Ch. 13, v. 8)
וְהִגַּדְתָּ לְבִנְךָ, בַּיּוֹם הַהוּא לֵאמֹר: בַּעֲבוּר זֶה, עָשָׂה ה׳ לִי, בְּצֵאתִי, מִמִּצְרָיִם
Tu donneras alors cette explication à ton fils: « C’est dans cette vue que l’Éternel a agi en ma faveur, quand je sortis de l’Égypte ».
Le premier verbe וְהִגַּדְתָּ « tu raconteras » est un langage empli de dureté (voir Talmoud Shabbath 87a), il s’agit de raconter « le déshonneur », de critiquer, tandis que le second verbe du verset לֵאמֹר est une parole douce, qui désigne dans notre contexte le compliment (au nom du Or Ha’haym).
Nos Maîtres enseignent que (Talmoud Nédarim 32a), par le fait qu’Avraham a dit « comment saurais-je que j’hériterai » (Genèse Ch. 15. v. 8) et a ainsi douté des comportements de l’Eternel, ses enfants ont été asservis pendant 210 ans. En réalité, on peut s’interroger ! Les pères mangeraient-ils des fruits non murs et ce serait les enfants qui en auraient les dents qui grincent [qui en ressentiraient les effets] ?
En fait, l’explication en est la suivante: les Israélites eux mêmes ont commis la même erreur et ont douté des comportements de l’Eternel [puis en sont arrivés à pratiquer l’idolâtrie] et se sont détachés de la foi pure, c’est pour cela qu’ils ont été asservis. De plus, il est écrit (Exode Ch. 20, v. 4)
פֹּקֵד עֲוֹן אָבֹת עַל-בָּנִים עַל-שִׁלֵּשִׁים וְעַל-רִבֵּעִים, לְשֹׂנְאָי.
qui poursuis le crime des pères sur les enfants jusqu’à la troisième et à la quatrième générations, pour ceux qui M’offensent;
Le Talmoud (Bérakhot 7a) précise que ce verset ne s’applique que si les Juifs poursuivent dans les comportements de leurs ancêtres. Ceci est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit de l’idolâtrie qui est une faute équivalente à transgresser tout le reste de la Torah.
C’est pour cela qu’il leur fallait annuler l’idolâtrie par l’immolation de l’agneau Pascal (l’agneau était une idole égyptienne) et d’asperger les portes des maisons (à l’extérieur, visible, provocateur) avec le sang de cet agneau afin de rappeler les mérites d’Avraham, Isaac et Jacob, qui ont abandonné l’idolâtrie. Car, par leur mérite, l’Eternel « a vu » [a pris en considération] le sang [et donc l’abandon de l’idolâtrie dans des conditions dangereuses] et n’a, en conséquence, pas donné le droit à l’Ange exterminateur de venir dans leur maison pour accomplir le fléau [la mort des premiers nés].
On peut également expliquer qu’au début, les idolâtres qu’étaient Térah et Na’hor étaient appelés « nos pères », car avant le don de la Torah nous leur étions rattachés généalogiquement mais, maintenant, Hashem nous a rapprochés de Son service et ils ne sont plus appelés « pères ». Nous n’appelons plus « Pères/Patriarches» que Avraham , Isaac et Jacob (Talmoud Bérakhoth 16b). C’est bien ce que signifie le verset de Josué ramené dans notre passage : « Vos ancêtres habitaient jadis au-delà du fleuve », mais Je ne les ai pas choisis comme patriarches, par contre Je pris votre père Avraham des bords du fleuve, c’est-à-dire que Je l’ai pris pour être votre patriarche, et vous n’êtes plus rattachés à ceux qui ont précédé Avraham (au nom du Emeth Léyaâkov).
2) Haggada Kos Eliahou, Rav Eliahou ben Harosh page 52 :
A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres, mais maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service Pour quelle raison le Magguid a-t-il éprouvé le besoin d’exprimer que maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service alors que c’est quelque chose d’extrêmement connu et, de plus, il n’apporte de preuve que sur « A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres » (et pas sur « mais maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service ») ? En conséquence, il n’aurait pas dû le dire. De plus, il nous faut comprendre pourquoi le verset dit vos ancêtres habitaient jadis au-delà du Fleuve ? S’il s’agit d’Avraham, Téra’h et Na’hor, cela ne correspond pas bien puisque seuls Téra’h et Na’hor servaient des dieux étrangers. Il y a une autre difficulté dans le langage « votre père Avraham » où en hébreu אֶת אֲבִיכֶם אֶת אַבְרָהָם le mot אֶת est utilisé deux fois, une seule fois était suffisante. Enfin, au lieu de dire et le conduisis à travers toute la terre de Canaan, il était suffisant de dire et le conduisis à travers la terre de Canaan.
Il me semble pouvoir expliquer ainsi : on enseigne dans le Talmoud (Péssa’him 116a) que l’on doit débuter le récit de la sortie d’Egypte par « la honte/le déshonneur » et on termine par « le compliment ». Il y a une discussion dans le Talmoud : « c’est quoi la honte/le déshonneur ? » Rav répond : « A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres » et Shémouel répond : « Nous fûmes esclaves de Pharaon en Egypte» [troisième passage]. Nous faisons comme les deux avis (nous disons les deux aspects).
Comme dans la « honte/déshonneur » de « Nous fûmes esclaves de Pharaon en Egypte» nous poursuivons le passage par « et l’Eternel notre D.ieu nous en a fait sortir », ce qui est raconté explicitement dans la Torah, alors de la même manière dans la « honte/déshonneur » de « A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres» nous disons également « maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service » [par symétrie].
Le Magguid apporte une preuve que nos ancêtres étaient initialement des idolâtres à partir du verset rapporté : Vos ancêtres habitaient jadis יָשְׁבוּ אֲבוֹתֵיכֶם מֵעוֹלָם [littéralement « habitaient vos ancêtres – מֵעוֹלָם » – ce dernier mot étant à expliquer]. On explique que le mot מֵעוֹלָם signifie « initialement » « au début » comme dans (Proverbes Ch. 8 v. 23)
מֵעוֹלָם, נִסַּכְתִּי מֵרֹאשׁ- מִקַּדְמֵי-אָרֶץ
Dès les temps antiques [au commencement des temps], je fus formée, tout au commencement, bien avant la naissance de la terre.
Ce mot מֵעוֹלָם « initialement » s’applique également à la fin du verset et ils servaient des dieux étrangers, c’est-à-dire qu’initialement résidaient [au delà du fleuve] vos ancêtres Téra’h, Avraham et Na’hor et ils ont servi des dieux étrangers. Le fait de servir des dieux étrangers s’applique également à Avraham, comme l’enseignent nos Sages qu’au départ Avraham se prosternait devant le soleil et la lune mais sans aucune volonté d’idolâtrie [il était dans la recherche du Créateur]. Il pensait qu’il s’agissait des divinités du monde, jusqu’à ce que l’Eternel se dévoile à lui et lui fasse savoir qu’Il (l’Unique) est le D.ieu du monde. C’est ce que nous précise le verset Je pris votre père Avraham (suite dans le passage 11-3).
3) Haggada Kos Eliahou, Rav Eliahou ben Harosh page 52 :
Je pris votre père Avraham, c’est-à-dire que l’Eternel a pris Avraham pour « Lui-même » et pour Son service et l’a séparé de la pratique de l’idolâtrie, le même verbe (que וָאֶקַּח je pris), dans le même sens, est utilisé à propos de ses descendants (Exode Ch. 6 v. 7)
וְלָקַחְתִּי אֶתְכֶם לִי לְעָם, וְהָיִיתִי לָכֶם לֵאלֹקִים; וִידַעְתֶּם, כִּי אֲנִי ה׳ אֱלֹקֵיכֶם, הַמּוֹצִיא אֶתְכֶם, מִתַּחַת סִבְלוֹת מִצְרָיִם
Je vous adopterai pour peuple, Je deviendrai votre D.ieu; et vous reconnaîtrez que Moi, l’Éternel, Je suis votre D.ieu, Moi qui vous aurai soustraits aux tribulations de l’Égypte.
C’est pour cela que le verset précise « votre père» car nous avons un principe « les actes des pères sont un signe pour les actes des enfants ». C’est-à-dire que de la même manière que Hashem a séparé votre ancêtre (Avraham) de l’idolâtrie, Hashem séparera, dans le futur, ses descendants de l’idolâtrie d’Egypte et les rapprochera de Son service. Le Magguid amène cela comme une forme de preuve à ce qu’il enseigne mais maintenant l’Omniprésent nous a rapprochés pour Son service.
Lorsque le verset dit [traduction littérale] « J’ai pris votre père, Avraham » (avec le motאֶת en « trop »), cela signifie « J’ai pris votre père, J’ai pris Avraham », c’est-à-dire que Je l’ai pris d’au delà du fleuve, lieu d’idolâtrie et d’impureté et Je l’ai amené dans la terre de Canaan, une terre sainte.
4) Haggada Shaarey Harmon page 75
Une fois, le Gaon Rabbi Avlé de Minsk Zatsal a posé la question suivante : pour quelle raison commençons nous le récit de la Haggada par « la honte/le déshonneur » et débutons par le fait que nos ancêtres ont été des idolâtres ? Il répondit par la parabole suivante :
Il y eut une fois deux villageois qui furent malades en même temps et avec les mêmes symptômes. Ils s’adressèrent au médecin du village qui était âgé. Il était à la fois médecin, infirmier et pharmacien tel qu’il était usuel de rencontrer dans les villages. Celui-ci les ausculta et prépara leurs médicaments. Il demanda à l’un cinq pièces d’or et au second vingt pièces d’or.
Le second patient fut stupéfait et demanda : « qu’est ce donc que cela, nos maladies sont identiques, pour quelle raison devrais-je payer le quadruple par rapport à mon ami ?! » Le médecin le regarda bien et répondit « il est vrai que vos maladies sont équivalentes mais vos médications sont différentes et vos convalescences seront également différentes ».
Le malade s’étonna : «Pour quelle raison ? Comment le savez vous ? Quelle en est l’explication? ».
Le médecin sourit et répondit : « Je suis âgé maintenant ; cela fait des dizaines d’années que je suis médecin de ce village. Je me souviens que votre grand-père souffrait du même mal, cette maladie est donc héréditaire et il sera donc très difficile de la guérir. Les médicaments sont très chers et le processus de guérison sera long. Il n’en est pas de même de votre ami qui est d’une nature saine ; sa maladie pourra être guérie facilement ».
La comparaison : lorsqu’on parle de l’exil et de la délivrance d’Egypte, il est difficile de comprendre comment nos ancêtres ont dégringolé jusqu’à la 49ème porte d’impureté en une période si courte, jusqu’à ce qu’il faille des «médications» si chères comme « une main forte », « un bras étendu » et « des grands prodiges » qui ont été faits devant eux dans le but d’intérioriser en eux la Emouna/foi. C’est pour cela que nous commençons par dire qu’il était difficile à nos ancêtres en Egypte de se séparer de l’idolâtrie parce que c’était une maladie « enracinée », « héréditaire »
מִתְּחִלָּה עוֹבְדֵי עֲבוֹדָה זָרָה הָיוּ אֲבוֹתֵינו …. תֶּרַח אֲבִי אַבְרָהָם….
A l’origine nos ancêtres étaient des idolâtres ….Téra’h père d’Avraham ….
Et même si nos Saints Patriarches, au fil des générations, ont repoussé la maladie, lors de notre séjour en Egypte, nous avons rechuté et nous sommes attachés à l’idolâtrie et l’idolâtrie s’est attachée à nous à tel point que nous avons eu besoin de médicaments onéreux, les dix plaies, pour bien les comprendre et tirer d’elles les enseignements de la foi, jusqu’à ce que nous soyons soignés totalement par le don de la Torah, par elle notre « défaut/maladie » a été totalement éradiqué.
5) Haggada Pirsoumé nissa, Rav Yaâkov Raqa’h pages 229-230
[א] Le Rav נאות יעקב explique [en rapportant l’enseignement du Talmoud (Péssa’him 116a)] que l’on doit débuter le récit de la sortie d’Egypte par « la honte/le déshonneur » et terminer par « le compliment ». [Nous avons ramené cet enseignement avec plus de précision dans le passage 11-1] On doit commencer le récit par « la honte/le déshonneur ». Comment ? En disant que nos ancêtres furent des idolâtres (notre passage). Ils avaient un statut de « Béné Noa’h » [Noachides, soumis aux sept lois des descendants de Noé] et non de Juifs et maintenant, D.ieu nous a rapprochés de Lui pour avoir un statut d’Israël. En conséquence, la Galouth [l’exil] a commencé avec Isaac. En effet, comme ils avaient un statut de Béné Noa’h alors Avraham Avinou n’a pas acquis la terre par « ‘Hazaqa»[1], car un non juif ne peut acquérir par « ‘Hazaqa » [en clair, Avraham n’a pas acquis la terre de Canaan] et c’est pour cela que le Magguid termine par «un compliment /une louange» dans la bénédiction à la fin de la Haggada « Source de bénédictions, Tu es Eternel notre D.ieu, qui nous a délivrés». La bénédiction de remerciements est faite à la finalisation de la délivrance [Et donc comme Avraham n’avait pas acquis la terre, le décret « dans une terre qui ne leur appartient pas » était réalisé et donc les 400 ans ont débuté à partir de la naissance d’Isaac. Il faut donc remercier l’Eternel d’avoir décompté de cette manière qui rapproche la fin de l’exil, sinon les Hébreux auraient été assimilés dans les 50 portes d’impureté ce qui aurait interdit toute rédemption]. Tel est l’essentiel de ses propos.
En toute humilité, il me semble pouvoir expliquer autrement, en se basant sur ce qui est enseigné dans le premier chapitre de la Guémara Shabbath : « c’est à cause de la faute de la vente de Joseph qu’a eu lieu l’exil d’Egypte ». les Tossafoth[2] expliquent que, même si D.ieu avait déjà décrété l’exil d’Egypte comme il est écrit dans le décret annoncé à Avram dans « l’Alliance entre les morceaux » [dans tout ce document, « l’Alliance entre les morceaux » désigne cet épisode] (Genèse Ch. 15, v. 13)
וַיֹּאמֶר לְאַבְרָם יָדֹעַ תֵּדַע. כִּי גֵר יִהְיֶה זַרְעֲךָ בְּאֶרֶץ לֹא לָהֶם. וַעֲבָדוּם וְעִנּוּ אֹתָם אַרְבַּע מֵאוֹת שָׁנָה. וְגַם אֶת הַגּוֹי אֲשֶׁר יַעֲבֹדוּ דָּן אָנֹכִי. וְאַחֲרֵי כֵן יֵצְאוּ בִּרְכֻשׁ גָּדוֹל:
D.ieu dit à Abram: « Sache-le bien, ta postérité séjournera sur une terre étrangère, où elle sera asservie et opprimée, durant quatre cents ans. Mais, à son tour, la nation qu’ils serviront sera jugée par Moi; et alors ils la quitteront avec de grandes richesses ».
cependant, la [grande] dureté de l’exil est due à la vente de Joseph.
Le Rav מטעם המלך rapporte au nom du Shlah Haqqadosh, que toute la raison pour laquelle les frères de Joseph l’ont haï est que celui ci voulait régner sur eux et d’une certaine manière se révolter contre la royauté de David. Du fait qu’il avait ce type d’arrière pensée cela a provoqué ses rêves [qui, pour ses frères, n’étaient donc pas des rêves prophétiques]. Ils ont considéré que la pensée est équivalente à un acte (et qu’on peut condamner quelqu’un sur ses pensées, si elles sont révélées).
Mais, tout ce raisonnement des frères de Joseph n’est valable que si on considère que les enfants d’Israël avaient un statut de Bbéné Noa’h [Noachides] et pas un statut « de juifs » puisque les Béné Noa’h peuvent être condamnés sur une intention non réalisée.
Il n’en est pas de même s’ils avaient un statut « d’Israël » pour lesquels une mauvaise intention n’est pas considérée comme un acte réalisé.
C’est pour cela que le Magguid nous dit qu’au début nos ancêtres étaient des idolâtres, avec un statut de Béné Noa’h [Noachide] et donc les frères de Joseph pouvaient juger de bon droit sur des intentions [révélées], et pas seulement sur des actes. Comme Joseph se révoltait, (uniquement dans les pensées) contre la royauté de la maison de David, il se révoltait dans ses pensées et en rêvait la nuit ! Il méritait donc châtiment. En conséquence les frères de Joseph ne sont pas coupables de sa vente et la difficulté de l’exil ne provient pas de cette vente puisqu’elle était légitime.
En vérité, la dureté supplémentaire de l’exil a permis de compléter le décompte des années décrétées, c’est-à-dire de limiter l’exil à 210 ans et non à 400 ans comme décrété dans « l’Alliance entre les morceaux » et de calculer le début des 400 ans à partir de la naissance de Isaac [Avraham n’ayant pas acquis la terre de Canaan, le décret qui précise « dans une terre qui ne leur appartient pas » peut dès lors s’appliquer, ce qui n’aurait pas été possible si Avraham avait acquis la terre]. En conséquence, on termine par une louange envers l’Eternel « Source de bénédictions, Tu es Eternel notre D.ieu, qui nous a délivrés», pour bénir l’Eternel afin de le remercier d’avoir tenu compte de la pénibilité de l’esclavage dans le nombre d’années qu’Il avait décrété.[3]
[ג] Jacob et ses enfants descendirent en Egypte. Le mot ירדו (descendirent) peut se décomposer en י(וד) רדו car par le mérite de Yaakov Avinou qui avait reçu dix (י) bénédictions de son père, ses descendants ne sont restés en Egypte que רדו 210 ans [רדו = 210].
[1] Avraham a parcouru la Terre de Canaan de long en large comme rapporté dans le verset (Genèse, Ch. 13 v17), cette action constitue un acte d’acquisition du bien « terre de Canaan » et s’appelle une ‘Hazaqa
[2] Commentaire du Talmoud, les Tossafoth recouvrent les enseignement de très nombreux Rabbanim et en particulier les petits-enfants de Rashi. Ils habitaient dans la partie nord de la France de l’époque.
[3] J’ai légèrement adapté sur la fin afin de la rendre accessible sans avoir lu tout ce livre.