Etude de la huitième bénédiction de la Amida « Guéris-nous, Eternel, et nous serons guéris. » Michel Baruch
Guéris nous Eternel
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בינו עמי עשו
Pour la guérison de tous ceux qui souffrent.
Etude de la huitième bénédiction de la Amida
La santé − רפואה תפארת יֹ-הֹ-וֹ-הֹֹ
Guéris-nous, Eternel, et nous serons guéris. Sauve-nous et nous serons sauvés, car Tu es notre louange. Et apporte remède et guérison à tous nos maux et à toutes nos souffrances et à toutes nos plaies, car Tu es D… qui guéris, miséricordieux et fidèle. Source de bénédictions Tu es, Eternel, qui guérit les malades de Son peuple Israël. |
רְפָאֵנוּ ה’ וְנֵרָפֵא, הוֹשִׁיעֵנוּ וְנִוָּשֵׁעָה, כִּי תְהִלָּתֵנוּ אָתָּה, וְהַעֲלֵה אֲרוּכָה וּמַרְפֵּא לְכָל תַּחֲלוּאֵינוּ וּלְכָל מַכְאוֹבֵינוּ וּלְכָל מַכּוֹתֵינוּ, כִּי אֵל רוֹפֵא רַחֲמָן וְנֶאֱמָן אָתָּה.
בָּרוּךְ אַתָּה יֹ-הֹ-וֹ-הֹֹ , רוֹפֵא חוֹלֵי עַמּוֹ יִשְׂרָאֵל. |
Il convient de prier à l’intention de tous les malades et pas uniquement pour soi. Il ne faut pas réduire les demandes à sa petite personne. Le sens de toutes les bénédictions est bien au contraire d’élargir au maximum le flux divin pour qu’il se déverse sur le plus grand nombre. Le Choul’han Aroukh (119,1) indique qu’il convient de prier pour les proches qui sont souffrants. Selon le Rav Ha Ari zl, il est préférable de faire cette demande en pensée dans cette bénédiction, et de la formuler dans Choméya Téfila.
Nos Maîtres se demandent pourquoi avoir placé la bénédiction pour la Délivrance en septième position avant celle pour la santé ? (Méguila 17b).
En effet, selon l’ordre des mots du verset (Psaumes 103,3-4) : « C’est Lui qui pardonne toutes tes fautes, guérit toutes tes souffrances. C’est Lui qui délivre ta vie de la mort », la bénédiction pour la guérison aurait dû être placée immédiatement après celle concernant le pardon, et celle pour la délivrance venant ensuite. Nos Maîtres répondent que la Délivrance devant arriver lors de la septième année, c’est pour cette raison qu’elle a été mise en septième position, repoussant de ce fait la guérison à la huitième place.
Cependant nos Maîtres poursuivent : pourquoi la bénédiction pour la santé se trouve-t-elle en huitième position ? Rav Aha répond : « Comme la Mila se fait le huitième jour, elle requiert la guérison qui est donc placée dans la huitième bénédiction » (Méguila 17b). Le Méharcha s’étonne de cette question : il n’est pas nécessaire de justifier la huitième place de cette bénédiction, étant évident qu’il convient de la rapprocher le plus possible de celle du pardon. Pour lui, le fait que la Délivrance doit arriver la septième année n’est pas en soi une raison suffisante pour changer l’ordre du verset.
En réalité, il ne convient pas aux hommes de prier pour leurs propres souffrances alors que le peuple d’Israël est en exil, que la Chékhina est souillée, méprisée, et que le lieu de la splendeur d’Israël est profané.
Après avoir obtenu la Délivrance, nous demandons la guérison et la santé pour pouvoir nous consacrer totalement au service divin. Il est recommandé de prier pour que D… nous garde en bonne santé, pour ne pas avoir à implorer le miracle de la guérison. C’est aussi pourquoi cette bénédiction est la huitième, le chiffre « huit » symbolisant ce qui est au-delà de la nature − למעלה מן הטבע (Maharal).
La Mila est le seul cas où nous pouvons « exiger » de Ha-Chem la guérison pour l’enfant, car il ne s’agit pas d’une maladie causée par un manquement mais d’une Mitsva. En plaçant cette bénédiction en huitième position pour la guérison des enfants nouvellement circoncis, nous demandons à Ha-Chem d’y inclure tous les autres malades.
« Guéris-nous, Eternel, et nous serons guéris » רפאנו ה’ ונרפא
Que signifie cette répétition : « Guéris-nous, Eternel, et nous serons guéris » ? Si Ha-Chem nous guérit, il est évident qu’alors nous le serons ! C’est que les médecins, tout en soignant leurs patients, peuvent leur causer des troubles secondaires aux conséquences négatives, comme dit le verset « Guérir, Il guérira » (Exode 21,19). Le malade doit parfois guérir des suites de sa guérison, alors que les soins que Ha-Chem nous dispense sont parfaits et définitifs.
« Guéris-nous Ha-Chem » : même là où la médecine a ses limites et pour les pathologies que les hommes ne savent pas soigner. J’ai espoir car c’est Toi qui me soignes.
« Sauve-nous et nous serons sauvés » הושיענו ונושעה
Quel lien y a-t-il entre la guérison et le salut ? C’est que nos fautes sont créées par les détracteurs qui nous accusent devant le Trône céleste, surtout lorsqu’il y a danger. « Sauve-nous de leurs accusations et nous serons sauvés des souffrances qui sont la conséquence de nos fautes. »
Dans le Chaar HaKédoucha, Rav ‘Haïm Vital enseigne que toutes les maladies et tous les maux dont souffre le corps ne sont en fait que les symptômes des troubles de l’âme. Quand nous demandons « Guéris-nous », il s’agit de l’âme, et quand nous disons « nous serons guéris », il s’agit du corps. Le Ran affirme que pour lui, il ne fait aucun doute que les maladies du corps ne sont que les conséquences de celles de l’âme. Le corps ne pourra pas guérir sans la guérison de l’âme (Drachoth 6). Si c’est ainsi, comment peut-on oser demander à Ha-Chem la guérison des maux de notre corps sans que nous nous donnions la peine d’en rechercher les causes ?
Les fautes et les transgressions, les comportements indignes (Midoth) sont les raisons de nos maladies. Il suffirait de se repentir pour guérir, comme dit le verset : « Qu’il s’amende alors et il sera guéri » (Isaïe 6,10). Il est vrai que nos fautes sont les causes de tous nos maux, mais elles ne sont pas les seules : la dureté de cet exil, sa longueur, le manque de discernement et de clairvoyance qui en découlent sont aussi responsables de nos faiblesses dans notre service envers Ha-Chem. C’est pour cela que la Délivrance précède la guérison.
Sur le verset « Je fixerai Ma résidence au milieu de vous, et Mon esprit ne se lassera point d’être avec vous » (Lévitique 26,11), le Ramban commente : « Quand le peuple d’Israël se trouvait à son véritable niveau, sa destinée n’était pas dirigée par les règles naturelles. » Ha-Chem bénissait son pain et ses eaux. Il éloignait la maladie des Bné Israël à tel point qu’ils n’avaient aucun besoin de consulter guérisseurs et médecins, comme dit le verset : « Car Je suis l’Eternel, Celui qui te guérit. »
C’est ainsi qu’agissaient les Justes à l’époque des prophètes, tel le roi Ezéchias (Isaïe 38,1) : « En ce temps-là, Ezéchias fut atteint d’une maladie mortelle. Le prophète Isaïe, fils d’Amots, lui rendit visite et lui dit : “Ainsi parle l’Eternel : donne tes ordres à ta maison, car tu vas mourir ; tu ne te rétabliras pas.“ Ezéchias tourna sa face vers le mur et implora l’Eternel en ces termes : “De grâce, Seigneur, daigne Te souvenir que j’ai marché devant Toi fidèlement et d’un cœur sincère, et que j’ai fait ce qui Te plaît !“ » (Rois II 20,2-3)
Au sujet du roi Assa, il est dit (Chroniques II 16,12) : « La trente-neuvième année de son règne, Assa eut les pieds malades. Bien que cette maladie fût extrêmement grave, il ne s’adressa pas à l’Eternel, mais aux médecins. » Ramban s’étonne : pourquoi est-il précisé que le roi consulta les médecins alors que sa faute était de ne pas s’être adressé à Ha-Chem ? Il avance que la faute du roi était double : d’une part, ne pas s’être adressé à Ha-Chem, et de plus avoir consulté des médecins. C’est comme si on disait de quelqu’un qu’il n’a pas mangé de la Matsa à Pessah mais du Hamets !
Que signifie « s’adresser à Ha-Chem » ? Ramban explique qu’à cette époque il suffisait de consulter les prophètes pour savoir la raison des maux qui accablaient les hommes. Dès lors, il ne restait plus au malade qu’à se repentir de sa faute pour obtenir la guérison. De même il est rapporté que pendant les 22 ans où Raba fut le Roch Yéchiva, Rav Yossef n’eut pas à consulter les médecins (Bérakhot 64a). De même il est dit : « La porte qui ne s’ouvre pas devant la Mitsva s’ouvrira devant le guérisseur » (Chir Ha-Chirim Rabba 6,17).
Si c’est ainsi, que signifie alors le verset : « Il [le] guérira et il sera guéri − ורפא ירפא » (Exode 21,19). De là nous apprenons que les médecins ont reçu l’autorisation de guérir (Baba Kama 85a). Et il n’est pas dit qu’il soit permis au malade de consulter des médecins. Mais comme l’habitude est prise de consulter et de suivre leurs prescriptions, ils ont alors l’obligation de tout faire pour sauver leurs patients (Ramban sur Lévitique 26,11).
Elicha conseilla à Na’aman, que la lèpre avait frappé, de se tremper 7 fois dans les eaux du Jourdain. Quand il en ressortit guéri, il sut alors que sa guérison était véritablement miraculeuse (Rois II chap.5).
Il ressort de cet enseignement que l’intention que nous devons avoir dans cette bénédiction doit être la guérison miraculeuse sans aucun lien avec le fait que nous devons consulter les médecins. Il ne s’agit donc pas d’implorer Ha-Chem pour que telle intervention réussisse ou que tel autre traitement soit efficace.
« Car Tu es notre louange » כי תהלתנו אתה
Grâce à Toi et par Ton Nom, je m’élève et je suis fier de dire que Tu es mon Sauveur.
« Et apporte remède et guérison à tous nos maux, à toutes nos souffrances et à toutes nos plaies »
והעלה ארוכה ומרפא לכל תַּחֲלוּאֵינוּ וּלְכָל מַכְאוֹבֵינוּ וּלְכָל מַכּוֹתֵינוּ−
Il est cité ici trois sortes de maux : la maladie interne, longue, les douleurs qui persistent, et les souffrances ponctuelles qui ne durent pas.
Les deux motsארוכה (Aroukha) et רפואה (Réfoua) signifient « guérison », mais le premier terme évoque une blessure qui se referme ou une fracture qui se ressoude. Cette rémission se fait de manière naturelle avec le temps. Alors que le mot « Réfoua » a le sens de guérir d’un mal interne par une intervention ou un traitement.
« Car Tu es un D… qui guérit, miséricordieux et fidèle »
כי אל רופא רחמן ונאמן אתה –
« El » : c’est la Mida de miséricorde absolue et totale. L’adjectif « miséricordieux » signifie que D… tient compte des souffrances du malade et lui administre un traitement sans douleur. « Fidèle » évoque celui qui ne tient pas compte des plaintes de son patient et lui administre le traitement nécessaire, bien qu’il soit pénible pour le malade. Ha-Chem, dans Son immense bonté, conjugue les deux attitudes pour le bien de Ses enfants.
Dans la bénédiction de Acher Yatsar (récitée en sortant des toilettes), nous disons : « Qui guéris toute chair » : il s’agit de préserver de tout dommage le corps de toutes les créatures vivantes, de faire en sorte que la « machine physiologique » fonctionne correctement. Dans la deuxième bénédiction (Guévouroth) où nous disons « Qui guéris les malades » : il s’agit de l’ensemble du genre humain. Ici le peuple d’Israël est précisé pour souligner l’attention particulière dont nous bénéficions (Hachga’ha Pratite).
Commentaires et éclairages du petit Michel Baruch