Trente septième passage – Ribbi Yossé Hagalili disait
רַבִּי יוֹסֵי הַגְּלִילִי אוֹמֵר מִנַּיִן אַתָּה אוֹמֵר שֶׁלָּקוּ הַמִּצְרִיִּים בְּמִצְרַיִם עֶשֶׂר מַכּוֹת. וְעַל הַיָּם לָקוּ חֲמִשִּׁים מַכּוֹת. בְּמִצְרַיִם מַה הוּא אוֹמֵר. וַיֹּאמְרוּ הַחַרְטֻמִּים אֶל פַּרְעֹה אֶצְבַּע אֱלֹקִים הִיא. וְעַל הַיָּם מַה הוּא אוֹמֵר. וַיַּרְא יִשְׂרָאֵל אֶת הַיָּד הַגְּדֹלָה אֲשֶׁר עָשָׂה ה׳ בְּמִצְרַיִם וַיִּירְאוּ הָעָם אֶת ה׳ וַיַּאֲמִינוּ בַּ ה׳ וּבְמֹשֶׁה עַבְדּוֹ:
כַּמָּה לָקוּ בְּאֶצְבַּע עֶשֶׂר מַכּוֹת. אֱמוֹר מֵעַתָּה בְּמִצְרַיִם לָקוּ עֶשֶׂר מַכּוֹת. וְעַל הַיָּם לָקוּ חֲמִשִּׁים מַכּוֹת:
Ribbi Yossé Hagalili [le Galiléen] disait, d’où sait on que les Egyptiens ont été frappés, en Egypte, de 10 plaies et sur que la mer ils ont été frappés de cinquante plaies ? En Egypte c’est ce qui est dit « Les devins dirent à Pharaon: « Le doigt de D.ieu est là !», et à propos de la mer il est dit « Israël reconnut alors la haute puissance que le Seigneur avait déployée sur l’Égypte et le peuple révéra le Seigneur; et ils eurent foi en l’Éternel et en Moïse, son serviteur ».
De combien de plaies ont-ils été frappés avec un doigt ? Dix plaies ! Déduis-en de là qu’en Egypte ils furent frappés de dix plaies et sur la mer ils ont été frappés de cinquante plaies.
1) Haggada Kos Eliahou du Rav Eliahou Ben Harosh page 67.
Ribbi Yossé le Galiléen disait, d’où sait on que les Egyptiens ont été frappés, en Egypte, de 10 plaies et sur que la mer ils ont été frappés de cinquante plaies ?
Il y a lieu de comprendre en quoi Ribbi Yossé Hagalili pose vraiment une question ? En effet, n’importe quel jeune élève sait qu’il y a eu dix plaies en Egypte et que celles-ci sont détaillées dans la Torah ! Abarbanel s’efforce avec difficulté d’expliquer ses propos.
Il est encore plus difficile de comprendre l’opinion de Ribbi Yossé Hagalili car on a une Mishna qui enseigne (Avot, Ch. 5 §4) que l’Eternel a frappé les Egyptiens de 10 plaies en Egypte et de 10 plaies sur la mer ; on est forcé de dire que l’enseignement rapporté dans cette Mishna (de Avot) n’est pas conforme à l’opinion de Ribbi Yossé Hagalili.
Une réponse est de dire que c’est cela le début de notre passage : d’où sais-tu (toi Ribbi Yossé) que les plaies sur la mer étaient au nombre de 50 c’est à dire qu’il n’y a pas le même nombre de plaies sur mer et sur terre ; et ce contrairement à cette Mishna qui indique qu’il y a eu autant de plaies sur terre et sur mer ?!
La Mishna est conforme à l’opinion de Ribbi Eliêzer et celle de Ribbi Âquiva qui considèrent (on peut le déduire de leurs propos respectifs) qu’il n’y a pas eu 50 plaies sur la mer mais seulement 10 plaies, chacun considérant selon son opinion que chaque plaie était constituée (décomposée) de 4 plaies ou de 5 plaies, mais qui n’ont pas dit dès le départ qu’il y avait une différence entre la terre et la mer et n’ont pas ainsi exprimé de contradiction avec la Mishna rappelée ci-dessus.
On ne peut pas dire non plus qu’ils se sont référés à cet enseignement de Ribbi Yossé (de manière implicite), ceci n’est pas possible puisque Ribbi Yossé est l’élève de Ribbi Âqiva qui est lui même l’élève de Ribbi Eliêzer comme on le voit dans le Talmoud. Les deux maîtres pensent que le mot יד utilisé dans le verset rapporté ici à le sens habituel dans la Torah (simplement une main, sans décompter les doigts comme le fait Ribbi Yossi).
אֱמוֹר מֵעַתָּה Cette phrase, que l’on retrouve également (adaptée) dans les deux prochains passages, n’est d’aucun de ces rabbins mais est dite par le Magguid qui explique que pour Ribbi Yossé Hagaléli qui pense que sur la mer les Egyptiens ont été frappés de 50 plaies alors s’il a le même avis que Ribbi Âquiva, que chaque plaie était constituée de 4 plaies, les Egyptiens ont été frappés de 200 plaies sur la mer et s’il a la même opinion que Ribbi Eliêzer, que chaque plaie était constituée de 5 plaies alors les Egyptiens ont été frappés de 250 plaies sur la mer.[1]
2) Hagadah ‘Hazon Ôvadia page 72 au nom du Gaon de Vilna.
רַבִּי יוֹסֵי הַגְּלִילִי אוֹמֵר … רַבִּי עֲקִיבָא אוֹמֵרil faut comprendre : pourquoi ces sages s’efforcent-ils d’augmenter le plus possible le nombre de plaies qu’ont subies les Egyptiens ? En fait on sait que l’Eternel nous a garanti une grande promesse (Exode Ch. 15 v26) :
וַיֹּאמֶר אִם-שָׁמוֹעַ תִּשְׁמַע לְקוֹל ה׳ אֱלֹקֶיךָ, וְהַיָּשָׁר בְּעֵינָיו תַּעֲשֶׂה, וְהַאֲזַנְתָּ לְמִצְוֹתָיו, וְשָׁמַרְתָּ כָּל-חֻקָּיו–כָּל-הַמַּחֲלָה אֲשֶׁר-שַׂמְתִּי בְמִצְרַיִם, לֹא-אָשִׂים עָלֶיךָ, כִּי אֲנִי ה׳ רֹפְאֶךָ.
Il dit: « Si tu écoutes la voix de l’Éternel ton D.ieu; si tu t’appliques à lui plaire; si tu es docile à ses préceptes et fidèle à toutes ses lois, aucune des plaies dont J’ai frappé l’Égypte ne t’atteindra, car moi, l’Éternel, Je te préserverai.
De même il est dit (Deutéronome Ch. 7 v15)
וְהֵסִיר ה׳ מִמְּךָ, כָּל-חֹלִי; וְכָל-מַדְוֵי מִצְרַיִם הָרָעִים אֲשֶׁר יָדַעְתָּ, לֹא יְשִׂימָם בָּךְ, וּנְתָנָם, בְּכָל-שֹׂנְאֶיךָ.
L’Éternel écartera de toi tout fléau; et toutes ces funestes plaies de l’Egypte, que tu connais bien, ce n’est pas à toi qu’il les infligera, mais à tes adversaires.
En conséquence, ces docteurs de la Mishna se sont efforcés d’augmenter le nombre des plaies subies par les Egyptiens afin qu’elles soient parmi des plaies dont J’ai frappé l’Égypte, et l’Eternel ne nous les infligera pas pour respecter et toutes ces funestes plaies de l’Egypte, que tu connais bien, ce n’est pas à toi qu’il les infligera.
3) Hagadah Pirsoumé Nissa de Rav Yaâkov Raqa’h (page 285).
Ribbi Yossé le Galiléen disait ; Le Rav נאות יעקב dans son commentaire sur la Haggada indique que nous trouvons toujours que la sortie d’Egypte est plus grande que l’ouverture de la mer, car la sortie d’Egypte est la plus grande de toutes les grandeurs comme on le voit au début de la Parasha de Yitro (qui se situe après ces deux évènements, l’accent est mis sur la sortie d’Egypte)
וַיִּשְׁמַע יִתְרוֹ כֹהֵן מִדְיָן, חֹתֵן מֹשֶׁה, אֵת כָּל-אֲשֶׁר עָשָׂה אֱלֹקִים לְמֹשֶׁה, וּלְיִשְׂרָאֵל עַמּוֹ: כִּי-הוֹצִיא ה׳ אֶת-יִשְׂרָאֵל, מִמִּצְרָיִם
Jéthro, prêtre de Midian, beau père de Moïse, apprit tout ce que D.ieu avait fait pour Moïse et pour Israël son peuple, lorsque l’Éternel avait fait sortir Israël de l’Égypte.
C’est bien la sortie d’Egypte qui est plus grande que tout. Il est donc surprenant qu’en Egypte il n’y ait eu « que » dix plaies et cinquante plaies lors de la fente de la mer. Le Rav dans ce livre y donne deux raisons.
Il me semble humblement qu’on peut répondre à partir de l’interrogation de מהר׳ם בן חביב dans ses commentaires manuscrits ; il s’interroge « pour quelle raison, lorsque les enfants d’Israël sont sortis d’Egypte le premier jour de Pâques et ont été sauvés d’un grand asservissement, n’ont ils pas proféré un chant et pourquoi ont ils attendus sept jours et la fente de la mer pour enfin entonner un chant[2] ?
Il est possible de dire que lorsqu’ils sont sortis d’Egypte ils se sont dits que les plaies étaient dues au fait que Pharaon avait dit
וַיֹּאמֶר פַּרְעֹה–מִי ה׳ אֲשֶׁר אֶשְׁמַע בְּקֹלוֹ, לְשַׁלַּח אֶת-יִשְׂרָאֵל: לֹא יָדַעְתִּי אֶת- ה׳ , וְגַם אֶת-יִשְׂרָאֵל לֹא אֲשַׁלֵּחַ
Pharaon répondit: « Quel est cet Éternel dont je dois écouter la parole en laissant partir Israël? Je ne connais point l’Éternel et certes je ne renverrai point Israël.
ou d’autres propos similaires [blasphématoires]. Donc les enfants d’Israël pouvaient considérer que les plaies n’étaient pas faites en leur faveur. Par contre lors de la fente de la mer, les Egyptiens ont été engloutis dans l’eau « comportement pour comportements » car ils noyaient les enfants Hébreux ; il était alors clair que les plaies dans la mer étaient faites en faveur d’Israël et en conséquence il ont entonné un chant.
C’est pour cela qu’en Egypte l’éternel les a frappés de 10 plaies (« seulement ») car on pouvait considérer que les plaies n’étaient pas en faveur d’Israël mais uniquement à cause des propos blasphématoires de Pharaon, par contre dans la mer il était clair que les plaies étaient faites en faveur d’Israël alors Il les a frappés de 50 plaies ; Hachem fait plus attention à l’honneur d’Israël qu’au sien.
[1] L’enseignement de Ribbi Yossé Hagaléli est indépendant des enseignements de R. Eliêzer et R. Âqiva. Il doit interpréter, d’une manière ou d’une autre le verset (commun) rapporté dans les deux enseignements qui suivent (passage 37 et passage 38).
[2] La Shira que nous disons tous les matins et que nous chantons tous les Shabbat avec ferveur.