Essav voulait à la fois la paix et la guerre avec Ya’akov. Paracha Vaychla’h. Réouven Carceles
Essav paix et guerre Ya’akov
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Ce cours est pour l’élévation de l’âme, léilouy Nichmat, de Hanna bat Rivka
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Dans la Paracha de la semaine (Vaychla’h) la torah nous dit : « Essav courut à sa rencontre, l’embrassa, se jeta à son cou et lui fit un baiser. Ils pleurèrent. » (33,4)
Rachi, sur place, remarque que le mot « vayichakéhou » (il l’embrassa) comporte des points au-dessus de chaque lettre (dans le Séfer Torah), pour comprendre cela le Midrach (Beréchit Rabba) nous dit au nom de Rabbi Chimon ben Eleazar, que lorsqu’il y a plus de texte que de points, le commentaire doit porter sur le texte, mais lorsqu’il y a plus de points que de texte, le commentaire doit porter sur les points. Mais ici, il y a autant de texte que de points, ceci vient nous enseigner qu’à cet instant précis, la pitié d’Essav s’éveilla et qu’il embrassa son frère de tout son cœur. « Rabbi Yanaï rétorqua : s’il en était ainsi, alors pourquoi fallait-il donc mettre des points ? Les points sont sensés renverser le sens du texte et non le renforcer, c’est-à-dire que pour Rabbi Yanaï, Essav ne vint pas pour embrasser Ya’akov, mais pour le mordre. Le cou de Ya’akov fut miraculeusement changé en marbre et Essav se cogna les dents dessus. Cela explique le fait qu’ils pleurèrent : Ya’akov, à cause de son cou et Essav, à cause de ses dents.
Le Chem Michmouel pose la question, et trouve étrange que ce Midrach affirme que le cou de Ya’akov s’est transformé en marbre. Nous comprenons, que le Midrach souhaite nous indiquer que le cou de Ya’akov s’est durci, empêchant Essav de le mordre. Pourtant, le Maître fait remarquer, que lorsque la Torah souhaite donner des exemples de matériaux durs, elle fait appel en général au fer ou au cuivre comme dans le verset suivant : « Le ciel qui s’étend sur la tête sera de cuivre, et la terre sous tes pieds sera de fer ». (Dévarim 28,23)
Alors pourquoi le Midrach emploie-t-il le marbre pour parler du durcissement du cou de Ya’akov ?
Il est possible de répondre, en examinant ce Midrach d’un peu plus prés. A première vue, il y a divergence concernant la sincérité d’Essav envers son frère. Mais en y regardant bien, nous pouvons peut-être remarquer qu’il n’y a pas ici de contradiction, en fait, Rabbi Chimon ben Eleazar et Rabbi Yanaï se penchent chacun sur un aspect différent de la rencontre. Ainsi, comment comprendre ces deux opinions ?
Avant de rencontrer son frère, Ya’akov demande à Hachem : « sauve-moi de grâce de la main de mon frère, de la main d’Essav… (32,12) ». Il y a lieu de se demander, pourquoi nomme-t-il Essav d’abord « mon frère », puis seulement ensuite « Essav » ? Le Or Ha’Haim Hakadoch explique que Ya’akov craignait davantage Essav lorsque celui-ci revêtait le masque du frère, qu’en tant qu’Essav à visage découvert. Car ce que Ya’akov craignait par-dessus tout, c’était que son frère ne se rapprochât de lui au point que lui-même ne se retrouve influencé par son mode de vie et sa vision perverse des choses. Pour Ya’akov et sa famille, il s’agissait là d’un danger bien plus menaçant qu’une simple atteinte physique. Un rapprochement avec Essav aurait empêché la mission de Ya’akov sur terre. C’est pourquoi la Torah nous précise qu’il demanda en premier lieu à être sauvé de la main de son frère, et ensuite, d’Essav lui-même.
A l’instar de ce qu’affirme Rabbi Chimon ben Eleazar dans notre Midrach, Essav fut rempli de pitié au moment où il aperçut Ya’akov. Et, Pour une raison inconnue, il décida de ne pas le tuer, c’est ce que nous enseigne le Zohar, qu’Essav haïssait son frère, mais à ce moment-là, sa pitié l’a emporté et il l’a embrassé de tout son cœur. Mais en ce qui concerne la volonté d’Essav de souiller son frère par son influence néfaste, rien ne changea à ce niveau. En réalité, le fait qu’il se soit rempli de pitié lors de cette rencontre indique que son intention de départ était bien d’éliminer son frère. Comment comprendre cela ?
En réalité, il faut y voir un concept plus profond. Le Rav Dessler nous enseigne, que n’importe quel événement dans la vie peut être vu sous deux angles : d’un point de vue extérieur, terre à terre, et d’un point de vue spirituel, plus élevé. Nous pouvons voir cela lorsque Ya’akov se prosterne à terre sept fois jusqu’à ce qu’il arrive devant son frère. Le Zohar pose la question, comment, le plus parfait des patriarches, put-il agir ainsi devant la puissance du mal ? En réalité, dit le Zohar, c’est devant la présence Divine (Chékhina) qui passait devant eux qu’il se prosternait. Nous voyons bien ici l’aspect extérieur, car effectivement, on peut penser que c’est le plus faible qui s’abaisse devant le plus fort, mais le Zohar nous apprend ici que Ya’akov sut s’élever au-dessus de cette situation pour voir non l’ennemi et sa puissance militaire, mais la présence de D.ieu, c’est-à-dire la vérité spirituelle.
Dans le même ordre d’idées, notre Midrach, nous enseigne que Rabbi Chimon ben Eleazar ne fait référence qu’à l’aspect matériel de l’attaque d’Essav, qui s’annula effectivement avec leur rencontre. Alors que Rabbi Yanaï, lui, ne se penche que sur l’aspect spirituel du triste dessein d’Essav, c’est-à-dire que pour lui, l’attaque préparée par Essav, prend ici toute son ampleur. En effet, on peut comprendre le commentaire de Rabbi Yanaï sur le rapport entre les lettres et les points comme une acceptation des deux sens à la fois : celui des lettres, le sens simple (l’aspect matériel) et celui des points, le sens caché (l’aspect spirituel). Le Chem Michemouel explique qu’Essav comptait faire la paix et la guerre à la fois, mais a deux niveaux différents. Ce qu’Essav souhaitait, c’était injecter ses idées empoisonnées à Ya’akov et l’entraîner à rejoindre son monde corrompu et empêcher sa réalisation, et donc contrecarrer le projet divin. A cet instant précis le cou de Ya’akov se changea en marbre. Nous nous étions posés la question : pourquoi le marbre ? Les ustensiles de pierre (parmi lesquels ceux en marbre) ne sont pas selon la Torah soumis aux lois de Touma et Tahara (lois de pureté et impureté rituelles). Nous comprenons donc pourquoi le Midrach a choisi précisément le marbre pour symboliser le cou de Ya’akov, au lieu du fer ou du cuivre généralement utilisés. Le cou de Ya’akov s’est ainsi rendu imperméable aux attaques lancées par Essav. Ya’akov put ainsi se protéger d’Essav, comment ? Grâce au marbre, qui ne peut contracter d’impureté.
Ce passage est une grande leçon pour nous tous. Nous devons nous inspirer de Ya’akov en veillant à nos priorités dans la vie. Le spirituel doit toujours l’emporter sur le reste, Ya’akov ne parvint à résister aux attaques d’Essav que grâce à sa préparation mentale en vue de cette rencontre, et, ce qui fut d’une grande utilité pour lui au moment de la rencontre, c’est qu’il était davantage inquiet pour son avenir spirituel que pour son bien-être physique. Nous aussi nous devons nous préparer aux attaques d’Essav à notre niveau, gérer nos priorités et ne pas tomber dans le piège du Yétser Hara, qui veut nous empêcher de voir la vérité et de nous réaliser.
Chabbat Chalom
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Ce cours « Essav voulait à la fois la paix et la guerre avec Ya’akov. Paracha Vaychla’h. Réouven Carceles » a été mis en ligne 10 décembre 2019 et mis à jour le 4 décembre 2020